France : Avis négatif à l'extradition d'Agathe Habyarimana vers le Rwanda
Afrique

@rib News, 28/09/2011 – Source Associated Press

Agathe Habyarimana, la veuve du président rwandais assassiné en 1994La Cour d'appel de Paris a émis mercredi un avis négatif à l'extradition vers le Rwanda d'Agathe Habyarimana, la veuve du président rwandais assassiné en 1994.

L'ex-première dame rwandaise était réclamée par Kigali pour son implication présumée dans le génocide de 1994. Le ministère public s'était opposé à la demande formulée par le Rwanda.

Kigali accuse la veuve du président Juvénal Habyarimana, dont l'avion a été abattu le 6 avril 1994, d'être l'un des artisans du génocide qui a débuté après ce drame et a fait entre 800.000 et un million de morts parmi les Tutsis et les Hutus modérés. Elle est accusée par les autorités rwandaises de génocide, crimes contre l'humanité et extermination.

La Cour d'appel, pour justifier sa décision, s'est fondée sur le principe de l'égalité des délits et des peines qui prévoit que nul ne peut être poursuivi pour un crime ou un délit qui n'est pas défini par la loi. Et celui de non rétroactivité de la loi pénale.

Les crimes pour lesquels Mme Habyarimana était réclamée par le Rwanda se sont déroulés entre 1990 et 1994. Or les textes pénaux rwandais les sanctionnant ne sont entrés en vigueur qu'en juin 2004, a rappelé la Cour.

Par ailleurs, elle a précisé dans son arrêt que ces crimes étaient jugés par des juridictions populaires, les Gacaca, qui ne répondaient pas "aux garanties fondamentales des droits de la défense".

Mme Habyarimana, entourée de proches, s'est dite "soulagée" et "contente" de cette décision de la chambre de l'instruction de la Cour d'appel de Paris. Le tribunal administratif de Versailles doit se prononcer sur sa demande de titre de séjour en France, où elle est arrivée en 1994.

"La procédure est terminée", a déclaré son avocat, Me Philippe Meilhac. "Elle a 70 ans et aspire à vivre paisiblement en France avec un titre de séjour", a-t-il ajouté, relevant que sa cliente "n'était pas une menace à l'ordre public".

Exfiltrée du Rwanda le 9 avril 1994 par l'armée française, Agathe Habyarimana a vécu ensuite au Zaïre (devenu Congo-Kinshasa en 1997) et en France, sans véritable titre de séjour. En 1998, le Gabon lui a délivré, sous une fausse identité, un passeport diplomatique.

L'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) puis la Commission de recours des réfugiés (aujourd'hui devenue la Cour nationale du droit d'asile) ont rejeté sa demande d'asile en raison de son implication présumée dans la politique génocidaire du régime rwandais.

Le parquet de Paris a ouvert en 2008 une information judiciaire contre X pour "complicité de crimes contre l'humanité" à la suite d'une plainte déposée par le Collectif des parties civiles pour le Rwanda contre Mme Habyarimana. Cette dernière n'a été entendue qu'en 2010 dans ce dossier. Et n'est pas mise en examen, a affirmé son avocat mercredi.

Une enquête est ouverte en France sur l'attentat contre l'avion du président Habyarimana, piloté par un équipage français. Sept proches de l'actuel président Paul Kagame sont mis en examen dans ce dossier pour "complicité d'assassinat en relation avec une entreprise terroriste".


France : Agathe Habyarimana ne sera pas extradée au Rwanda

Agence Hirondelle, 28 septembre 2011

Paris – « Il n'y a pas lieu d'extrader Mme Agathe Habyarimana vers le Rwanda » a annoncé mercredi Edith Boizette, la présidente de la chambre de l'instruction de la cour d'appel du tribunal de Paris, en réponse à une demande d'extradition déposée fin 2009 par le Rwanda, à la faveur du réchauffement diplomatique avec Paris.

Présente à l'audience, la veuve de l'ancien président Rwandais s'est déclarée « soulagé ». « J'ai toujours fait confiance à la justice française », a-t-elle ajouté à l'issue de l'audience, encadrée par sa famille et ses proches.

Le rejet de la demande d'extradition rwandaise entraîne pour  Habyarimana la levée de sa mise sous contrôle judiciaire, a précisé la présidente de la chambre d'instruction.

Les motifs de cette décision sans surprise lui ont été notifiés par écrit à l'audience. Comme dans la majorité des demandes d'extradition, jusqu'ici toutes refusées vers le Rwanda, l'antériorité des crimes allégués sur les lois permettant d'y juger des faits de génocide est invoquée.

« Mais cette fois, les juges ont marqué le coup de façon cinglante vis-à-vis des demandes rwandaises, en soulignant que les faits reprochés sont décrits sans aucune précision et ne sont détaillés par aucun élément à charge et à décharge », se félicite son avocat Philippe Meilhac.

Une description qui rejoint celle faite le 29 juin dernier par le représentant du ministère public, Jean-Charles Lecompte, qui estimait la demande d'extradition rwandaise « marquée par une certaine approximation, un flou artistique qui entoure la description des faits".

« Nous sommes satisfaits, c'est une décision parfaitement logique, mais qui pose maintenant la question de la procédure pénale intentée contre Mme Habyarimana en France, car les juges d'instruction n'ont pas dû avoir tellement plus d'éléments. Il va donc bien falloir qu'ils prennent l'initiative de la convoquer, afin qu'elle puisse enfin s'expliquer dans un cadre strictement judiciaire », ajoute Philippe Meilhac.

Dans une procédure parallèle, engagée en France suite à une plainte déposée en 2007 pour « complicité de génocide » par une association de défense des victimes, le Collectif des parties civiles pour le Rwanda (CPCR), l'ancienne première dame rwandaise a été entendue une fois par des enquêteurs de la gendarmerie parisienne, comme simple témoin, le 9 mars 2010.

« Ma cliente est âgée, elle a 70 ans, tout ce qu'elle espère c'est de pouvoir enfin vivre en France tranquillement avec ses enfants. Il faut arrêter cette campagne de diabolisation permanente ! », s'est également exclamé Me Meilhac devant la presse.

Agathe Habyarimana attend maintenant la décision du tribunal administratif de Versailles, qui devait se prononcer à partir du 21 septembre sur sa demande de titre de séjour dans le département de l'Essonne, où elle réside avec certains de ses enfants depuis plusieurs années. Cette demande de titre de séjour lui a déjà été refusée à deux reprises.

La veuve de l'ancien président rwandais attend également, « dans les semaines qui viennent » d'après son avocat, d'être convoquée par le juge d'instruction Marc Trévidic pour entendre les résultats de l'expertise balistique qu'il a fait réaliser sur l'attentat du 6 avril 1994, dans lequel son mari et le président du Burundi ont été tués.

FP/GF