La Déclaration universelle des droits de l'Homme a soixante ans
Droits de l'Homme

@rib News, 10/12/2008 - Source AFP

Il y a soixante ans, le 10 décembre 1948, l'Assemblée générale de l'Onu adoptait à Paris la Déclaration universelle des droits de l'Homme (DUDH) texte fondateur qui a inspiré le droit international d'après-guerre, mais dont l'idéal proclamé reste lointain et contesté.

Soixante ans après son adoption, la DUDH est confrontée à des défis nouveaux comme la lutte antiterroriste, la montée de pays comme la Chine, l'affirmation du fait religieux ou la répression de la "cyber-dissidence".

La crise économique et les bouleversements climatiques, qui aggravent la pauvreté, les migrations massives et les risques de conflits, mettent aussi à l'épreuve les acquis précaires de la déclaration, soulignent des spécialistes.

Inspirée par la déclaration française des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et la déclaration d'indépendance américaine de 1776, la Déclaration universelle des droits de l'Homme (DUDH) a pour première origine le traumatisme engendré par la seconde guerre mondiale et le génocide des juifs par les nazis.

"Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits", proclame le premier article de la déclaration, qui en trente points énumère des droits humains, civils, économiques, sociaux et culturels, "inaliénables" et "indivisibles".

Le texte fut adopté par les 58 Etats alors membres de l'assemblée générale de l'Onu, à l'exception de l'URSS, des pays d'Europe orientale, de l'Arabie saoudite et de l'Afrique du Sud, qui s'abstinrent. Car la déclaration est le fruit de débats complexes, et a été élaborée dans un climat de début de Guerre froide. L'URSS et ses satellites insistaient notamment sur les "droits réels", économiques et sociaux, contre les "droits bourgeois" civils et culturels défendus par les démocraties occidentales.

Ces dernières, de leur côté, résistaient à l'idée de traduire la déclaration en instrument juridique contraignant, craignant qu'il ne fût utilisé contre elles par les pays colonisés. De fait, ce n'est qu'en 1966 que furent adoptés par l'Onu deux pactes contraignants qui constituent, avec la DUDH, la charte des droits de l'Homme de l'Onu.

Mais malgré ses ambigüités et les arrière-pensées qui ont présidé à sa création, le texte de 1948 reste, selon le mot du juriste français René Cassin, qui participa à son élaboration, "le premier manifeste que l'humanité organisée ait jamais adopté".

Sans valeur contraignante, la DUDH a inspiré tous les traités internationaux de l'après-guerre, et est généralement reconnue comme le fondement du droit international relatif aux droits de l'Homme. Les conventions internationales de 1979 contre la discrimination envers les femmes, de 1984 contre la torture, de 1990 sur les droits de l'enfant, la création de la Cour Pénale internationale (CPI) en 1998 découlent directement de la DUDH.

En outre, les droits de l'homme restent une "idéologie", selon le terme de l'ancien ministre français de la Justice Robert Badinter, idéologie contestée par des Etats qui dénoncent une vision purement occidentale et qui remettent en cause son universalisme. "Il y a un courant souverainiste --chacun est maître chez soi--, représenté notamment par la Chine, le Venezuela, Cuba ou la Birmanie, et un courant islamiste, qui estime que les droits de l'Homme sont le produit d'une pensée religieuse révélée", estimait M. Badinter lors d'une récente conférence à Paris.

Pour ce militant farouche de l'universalisme des droits de l'Homme, le monde est entré "en régression" dans ce domaine, depuis les attentats du 11 septembre et la politique "désastreuse" menée par les Etats-Unis puis par les démocraties européennes sous couvert de lutte contre le terrorisme.

"Nous avons renié ce que nous prétendons défendre, et nous en supporterons longtemps les conséquences", prévoit-il.