La justice rwandaise refuse à Leon Mugesera un procès en français
Afrique

@rib News, 28/04/2012 - Source AFP

La justice rwandaise a refusé vendredi à l'ancien homme politique Léon Mugesera, renvoyé en janvier par le Canada dans son pays, où il est accusé d'incitation au génocide de 1994, le droit d'être jugé en français, comme il le réclamait.

M. Mugesera, linguiste originaire du Nord du Rwanda, qui vivait au Canada depuis 1993, était réclamé par la justice rwandaise depuis 1995 pour un discours célèbre prononcé en 1992 lors d'un meeting du parti du président Juvénal Habyarimana, dont il était membre.

Il est accusé d'avoir, dans ce discours prononcé en kinyarwanda, langue officielle du Rwanda avec le français et l'anglais, qualifié les Tutsi de cafards et d'avoir encouragé les Hutu à les tuer.

Kigali considère que ce discours est un des éléments déclencheurs du génocide de 1994, au cours duquel sont mortes jusqu'à 800.000 personnes, essentiellement tutsi.

Les audiences de pré-détention ont toutes été faites en kinyarwanda et il (M. Mugesera) a clairement montré qu'il comprenait et parlait le kinyarwanda, a estimé le juge Athanase Bakuzakunde, devant la Haute Cour rwandaise à Kigali.

Le discours de Mugesera était en kinyarwanda, le témoin comprend le kinyarwanda et donc nous ne voyons aucun avantage à utiliser le français, a-t-il dit.

La famille de M. Mugesera voulait un procès en français pour qu'il puisse être compris par des observateurs internationaux, avait de son côté expliqué la fille de l'accusé, Carmen Nono, le week-end dernier.

Selon elle, sa famille s'inquiète du risque que le procès ne soit pas équitable: son père aurait du mal à obtenir un avocat étranger parce que ceux qu'il approche ont peur de se retrouver au Rwanda.

Le principal point dans cette affaire n'est pas de savoir si (M. Mugesera) parle couramment le kinyarwanda, avait expliqué le procureur général rwandais, Martin Ngoga, devant la presse la semaine dernière. L'important, pour lui, est l'objet du crime, qui est le discours qu'il a prononcé en kinyarwanda (...) Nous ne voulons pas nous écarter du discours original.

La justice rwandaise a officiellement inculpé M. Mugesera de planification du génocide de 1994, incitation à prendre part au génocide et distribution d'armes le 2 février, une semaine après son retour du Canada. La prochaine audience de procédure est prévue le 9 mai.

Le Canada avait expulsé M. Mugesera le 23 janvier, après plus de 15 ans de procédure judiciaire de la part de l'accusé, qui affirmait risquer la torture, voire la mort au Rwanda et qu'il n'y aurait pas droit à un procès équitable.