Le gouvernement burundais interdit une conférence de presse de Human Rights Watch
Droits de l'Homme

@rib News, 02/05/2012 – Source AFP

Le gouvernement burundais a interdit, sans explication, une conférence de presse au cours de laquelle Human Rights Watch (HRW) devait présenter mardi un rapport sur les violences politiques dans le pays, a annoncé l'organisation de défense des droits de l'Homme.

Dans ce rapport de 89 pages, intitulé « Tu n'auras pas la paix tant que tu vivras », HRW dénonce une escalade de la violence politique depuis les élections de 2010 au Burundi et l'impunité dont bénéficient ses acteurs qui seraient à la fois, selon l'organisation, les autorités burundaises et les groupes armés d'opposition.

Aucun responsable du ministère burundais de l'Intérieur, contacté mardi, n'a souhaité s'exprimer ni sur ce rapport ni sur l'interdiction de la conférence de presse.

Nous regrettons que le ministre de l'Intérieur ait interdit notre conférence de presse de ce (mardi) matin, où l'on devait présenter notre nouveau rapport sur le Burundi, a déclaré Carina Tertsakian, chercheuse à la division Afrique de HRW.

Le ministre nous a écrit une lettre où il dit qu'il ne donne pas son accord pour la conférence, sans aucune explication ou justification, a-t-elle ajouté, estimant que le gouvernement semblait avoir réagi au titre du rapport.

La représentante de HRW au Burundi, Neela Ghoshal, accusée de complicité avec l'opposition, avait été expulsée mi-juin 2010, mais nos relations s'étaient normalisées depuis, a estimé la chercheuse de HRW.

Dans ce rapport, HRW estime que plusieurs dizaines de personnes ont été tuées dans des attaques politiques au Burundi depuis la fin 2010.

Ces meurtres, certains commis par des agents de l'état et des membres du parti au pouvoir, d'autres par des groupes armés d'opposition, traduisent l'impunité généralisée, l'incapacité de l'Etat à protéger ses citoyens et l'inefficacité du système judiciaire, écrit HRW.

L'organisation accuse le gouvernement burundais d'avoir tenté de minimiser l'ampleur des tueries en les attribuant à des criminels de droit commun et en affirmant que le Burundi était en paix.

Le secrétaire-général adjoint aux droits de l'Homme des Nations-Unies, Ivan Simonovic, a chiffré mardi à Bujumbura, à l'issue d'une visite de trois jours, à 61 le nombre de cas d'exécutions extrajudiciaires recensés par l'ONU dans le pays, sur lesquels seuls huit ont fait l'objet d'enquête et ont été résolus.

Selon M. Simonovic, les victimes ont été exécutées pour leur affiliation politique, que ce soit au parti au pouvoir ou à des formations de l'opposition.

Le faible nombre de cas résolus montre les insuffisances des forces de sécurité et de l'appareil judiciaire, a-t-il déploré.

Dans son rapport, HRW accuse aussi les autorités d'avoir harcelé et intimidé des journalistes et militants de la société civile ayant rendu compte de ces meurtres. Ce serait plus constructif pour le gouvernement d'amorcer un dialogue pour mettre fin aux violences, plutôt que d'interdire notre conférence de presse, a-t-elle souligné.

Depuis la contestation des élections générales de 2010 par l'opposition, le Burundi vit au rythme de nouvelles violences qui font craindre la reprise des hostilités à plus grande échelle dans ce pays qui a connu une longue guerre civile de 1993 à 2006.