Burundi : Oppression et exploitation 50 ans après l’indépendance
Opinion

@rib News, 30/06/2012

Le cinquantenaire sera célébré dans une discorde nationale totale

Par Nyandwi Léon

Malgré les tentatives du pouvoir de peindre en rose la situation du pays, la réalité est que le pays va mal. Très mal. A la veille des festivités du cinquantenaire, l’insécurité a atteint des niveaux jamais égalés depuis la fin de la guerre civile. Le pillage étatique et l’impunité sont devenus des politiques gouvernementaux bien assainis. Sur cela s’ajoute un recul inquiétant enregistré en matière de la démocratisation des institutions, le respect des droits de l’homme, la liberté d’expression et d’opinion.

Le CNDD-FDD ne peut pas continuellement gaver des mensonges à tout un peuple alors que la vérité crève les yeux : le parti présidentiel s’est substitué à l’Etat et ce n’est pas quelques boulevards entretenus à la hâte qui changera l’état alarmant dans lequel le pays est plongé. Demain, la mouvance présidentielle célébrera seule l’indépendance alors que l’opposition a été contraint à l’exile ou à la clandestinité. Quelle indépendance ! Quelles célébrations !

Des structures militaro-civile sous le contrôle de quelques individus autour du Président s’érigent en pouvoir parallèle et concurrence ouvertement le monopole de l’État sur l’usage de force.  Partout dans le pays les Imbonerakure s’improvisent comme policiers et arrêtent - et même tuent des civils innocents. Les arrestations menées par les agents des SNR ou de la Police se transforment souvent en enlèvements et assassinats. Et comme l’oppression engendre toujours la résistance, le peuple souverain du Burundi commence à se lever pour dire non à cette tyrannie.

Selon des témoins oculaires et fiables, les maquisards sont désormais maîtres de la Kibira et leurs effectifs ne cessent de s’accroître. Leur influence s’étendrait même au delà de cette forêt. La fréquence des affrontements entre l’armée et ces rebelles deviennent monnaie courante. Fidèle à sa «Politique d’Escargot», le gouvernement s’entête. Le Régime Nkurunziza II jure par tous les saints que cette question sera réglée sous peu, par les armes – mais il ne faut pas être savant pour connaître qu’aucun gouvernement au monde n’a jamais remporté une victoire contre le peuple. Tôt ou tard les masques tombent.

En matière de la démocratie, le Burundi sous le président Nkurunziza ne diffère guerre de celui de Bagaza, Buyoya et Micombero. A part quelques partis Nyakuri, le multipartisme est mort. Les prisonniers politiques et d’opinions remplissent les centres de détention alors que les fosses communes, les lacs, les rivières et mêmes les latrines deviennent la dernière destination pour les moins chanceux. L’emprisonnement, la torture et la mort sont devenus des outils politiques préférés du CNDD-FDD.

A la veille des festivités de 50 ans d’indépendance, le Burundi aura aussi brisé des records dans la mauvaise gouvernance et la corruption. Si les exemples du pillage étatique organisés que subit le Burundi sont légions, le cas le plus légendaire est celui de l’Honorable Mohamed Rukara, pilier du Régime Nkurunziza II, 2e homme du parti présidentiel et Médiateur des burundais. Cependant la Présidence, le Parlement, le Sénat et la Justice gardent un silence fracassant. Demain, cet ‘Honorable’ sera aux côtés du Président Nkurunziza II et les autres, sourire aux lèvres, célébrant l’«indépendance» d’un pays dont ils auraient largement contribué à salir l’image. Sauf par miracle, l’Honorable Rukara devra garder son prestigieux poste de Médiateur des burundais.

Incontestablement, l’indépendance du pays reste strictement symbolique pour n’est pas dire illusoire surtout pour le petit peuple. Pour remplir les poches de l’Etat, donc de la clique mafioso régnant sur le pays, les célébrations de l’indépendance seront marquées par l’augmentation des taxes sur le tabac et la bière (des denrées d’une importance capitale pour ‘Madame et Monsieur Tout le monde)’ - voila une drôle façon de faire bien célébrer un peuple déjà enfoncé dans une pauvreté abjecte (remarquez ici que les voitures, les importations de luxe destinées aux plus nantis sont épargnées).

En réalité, à son départ, le colon blanc (Belge) a été remplacé par un colon noir (autochtone) et ce système d’oppression et d’exploitation reste d’actualité aujourd’hui.  Malgré ce qu’une grande opinion avait espéré au début, le Président Nkurunziza et le CNDD-FDD s’inscriront aussi dans cette même logique.  Heureusement qu’aujourd’hui le peuple a compris que aussi longtemps que l’autoritarisme, la corruption, l’injustice et l’insécurité fleurissent au Burundi, la notion de l’indépendance sera vide de sens.

Par Nyandwi Léon