Débat sur la maitrise de la démographie au Burundi
Opinion

@rib News, 21/07/2012

A propos de la régulation de la démographie

Par Dr Isidore Nkunzumwami

Je réagis sur les propos du ministre de l'Intérieur à propos de l'idée qu'il a de réguler la démographie dans notre pays. Sur quelles données le ministre de l’Intérieur se base-t-il pour fixer le nombre d’enfants par futur couple burundais à trois ?

Dès qu’il y a loi, il y a interdiction. Et dès qu’il y a interdiction, souvent des idées sont mises  en place pour contourner l’interdit. Souvent les conséquences sont inattendues et dramatiques.

Le murundi est majeur à quel âge ? Cette loi va passer la majorité d’un garçon à 28 ans, et celle d’une burundaise à 25 ans ! Quand on voit quel retard le Burundi a pris à commencer la scolarité de ses enfants, on passe à la vitesse supérieure   en infantilisant des adultes !

Au fait, en dehors de la position, espérée personnelle, du ministère de l’Intérieur, quelle est celle officielle du ministère de la Santé ? C’est à ce dernier, je crois, de s’occuper de la démographie de la population.

Sans polémique, la réalité est là. Si la démographie au Burundi n’est pas maîtrisée, la situation sera pire d’année en année. Au Burundi, pays classé parmi les plus pauvres, nous arrivons à une situation démographique où des choix rapides et immédiats s’imposent, car notre pays est trop petit, avec des ressources très limitées. Notre croissance de natalité ne peut être toujours exponentielle. Il faut inverser cette courbe.

Quelles sont les solutions ?

1. La Chine a dû limiter la naissance à 1 seul enfant par famille par une loi. Cela a marché au prix du silence des réalités cruelles derrière ce communisme de masse. Avortements secrets et mortalité maternelle cachés, déséquilibre démographique important (plus de 120 garçons pour moins de 100 filles, les familles préférant garder les nouveaux-nés garçons) ; et corollaire de tout cela, assassinats de nouveaux-nés filles et vols et trafics de nouveaux-nés garçons. Et, sans oublier que cette loi limitative ne concernait en réalité que le petit peuple. Les riches eux pouvaient avoir plus d’un seul gamin. Abusive en Chine, la loi similaire le serait encore chez nous. Et vous savez pourquoi mesdames, messieurs.

2. Un génie a avancé l’idée de réduire les besoins nécessaires de chacun, pour que chaque citoyen ait le minimum. Situation envisageable dans un pays super riche qui a de quoi partager. Là encore, souvent le partage est tellement inégal qu’il frôle l’illégalité. Notre pays n’est pas concerné par le partage. Il n’a rien à partager.

3. Suite à la densification des zones occupées, une solution serait de trouver de nouveaux espaces vitaux comme construire sur les montagnes ou sur les mers. Nous n’avons ni l’un ni l’autre. Il ne nous reste que l’invasion des pays voisins. De ce côté, raté. La Tanzanie a compris la nécessité de maintenir ses espaces libres et interdits de nouvelles populations. Pas de nouveaux réfugiés, retours des réfugiés chez eux. Sous couvert de régler la question des réfugiés, la Tanzanie se frotte les mains de ne pas connaître ni maintenant ni plus tard la dramatique question de démographie à la burundaise. Le Rwanda, arguant de poursuivre les génocidaires au Congo cherche en réalité une solution à court et long terme de leur démographie. La dite question de démographie ne se pose pas clairement aujourd’hui, boom économique exige, mais elle là, moins criante que chez le voisin Burundi, mais elle est là !!

4. La régulation de la démographie au Burundi ne doit pas se faire par contrainte, par loi. Elle ne sera pas résolue par l’invasion des voisins ou en créant des nouveaux conflits qui engendreront des réfugiés Elle doit résulter d’une prise de conscience globale initiée et encouragée par le gouvernement via son ministère de la santé, aidé par la société civile, avec l’appui financier de la communauté internationale.

Elle doit intéresser :

- l’éducation de la population à la contraception,- donner facilement accès à l’usage de la contraception féminine,

- favoriser la prévention des grossesses non désirées  par la vulgarisation et la gratuité de capotes masculines et féminines,

- de promouvoir l’éducation sexuelle dans les écoles,

- d’éviter à ce que les petites filles n’entrent dans la prostitution pour payer les études ou aider les familles,

-de punir sévèrement tout adulte qui se livre aux rapports sexuels sur mineures,

- favoriser et règlementer la régulation permanente des naissances chez la femme (ligature des trompes spécialement) et surtout et avant tout faire comprendre à l’homme et à la femme burundaise que l’enfant, avant qu’il ne soit un instrument de production, est d’abord une charge à nourrir, à entretenir, à éduquer. Donc avoir des enfants à qui on peut offrir nourriture, entretien et éducation.

Ce sont seulement des idées. Si quelqu’un veut compléter, il s’adresse à ARIB.INFO.

Dr Nkunzumwami Isidore