Exécutions extrajudiciaires : le pouvoir burundais s’autoblanchit
Justice

RFI, 24 août 2012

Pour la justice burundaise, il n'y a pas eu d'exécutions extra-judiciaires depuis 2010

Il y a quelques mois, les autorités burundaises ont mis en place, sous la pression des bailleurs de fonds de ce pays, une commission judiciaire chargée d’enquêter sur les dizaines de cas d’exécutions extrajudiciaires et de torture. Celles-ci sont dénoncées depuis les dernières élections générales de 2010 par les organisations locales et internationales de défense des droits de l'homme.

Mais en présentant jeudi 23 août son rapport, la fameuse commission a déclaré qu'elle n'avait constaté aucun cas répondant à la définition d'exécution extrajudiciaire.

C’est le procureur général de la République du Burundi qui s’est chargé d’administrer la douche froide à la société civile burundaise et aux organisations internationales à l’origine de ces rapports. « Non. La commission d’enquête n’a trouvé aucun cas qui répond à la définition d’une exécution extrajudiciaire », a martelé à plusieurs reprises Valentin Bagorikunda.

Le rapport des Nations unies, qui dénonce au moins 61 de ces cas rien que pour la seule année 2011, a été balayé du revers de la main par le procureur qui estime que celui-ci est presque une copie d’un autre produit par une organisation locale, l'Association pour la protection des personnes détenues et des droits humains (Aprodeh) : « Il faut faire observer que ces rapports sont produits en violation des principes consacrés par les Nations unies en matière d’enquête sur les exécutions extrajudiciaires ou sommaires. »

Plusieurs diplomates étaient sous le choc au sortir de cette réunion. « On ne s’attendait pas à de graves révélations, mais là c’est trop ! », s’est insurgé l’un d’eux sous le couvert de l’anonymat.

La société civile burundaise, elle, n’avait pas été invitée, mais elle a fortement réagi. L’un de ses principaux leaders, Pacifique Nininahazwe, le délégué général du Forum pour le renforcement de la société civile (Forsc, une plateforme qui regroupe quelque 160 associations) : « C’est une grande déception. Il y a lieu de craindre que dans les jours à venir, ce phénomène ira en se multipliant. Du moment que le pouvoir ne reconnaît pas les fautes qui ont été commises. »

Aujourd’hui, tout le monde retient son souffle et attend la réaction des principaux bailleurs du Burundi dont l’Union européenne qui s’est dit de plus en plus préoccupée par ces cas intolérables de violation des droits de l’homme dans ce pays.