La Belgique "convaincue" d'une implication rwandaise en RDC
Diplomatie

@rib News, 12/09/2012 – Source Belga

Le ministre des Affaires étrangères, Didier Reynders, s'est déclaré mercredi "convaincu" d'une implication, "directe ou indirecte", du Rwanda dans la mutinerie qui sévit dans l'est de la République démocratique du Congo (RDC). Il a appelé une nouvelle fois Kigali à collaborer afin de mettre fin à cette rébellion, sous peine de sanctions.

"Le Rwanda doit condamner la rébellion (du mouvement du 23 mars, M23) de façon explicite" et participer à l'action pour y mettre fin sur le terrain en évitant tout soutien et toute action qui pourrait encourager cette rébellion", a-t-il affirmé devant les commissions des relations extérieures du Sénat et de la Chambre à Bruxelles.

M. Reynders (MR) a ajouté qu'il avait une nouvelle fois répété ce message à son homologue rwandaise, Louise Mushikiwabo, avec laquelle il eu mardi et mercredi un entretien téléphonique dans la foulée de sa visite en RDC et au Rwanda fin août. "Ma conviction, c'est qu'il y a un soutien direct ou indirect de gouvernement rwandais (dans) ce qui se passe dans l'est du Congo", a ajouté le ministre, tout en soulignant que le gouvernement congolais devait quant à lui faire d'"énormes efforts" pour restaurer l'autorité de l'Etat sur l'ensemble de son territoire, y compris l'est du pays.

Ce qui passe notamment par une réforme et une professionnalisation de l'armée, auxquelles la Belgique est prête à aider, notamment en formant un troisième bataillon des Forces armées de la RDC. Mais "l'urgence, c'est de mettre fin à la rébellion et à cette tentative d'administration d'une petite partie du territoire du Nord-Kivu par un petit mouvement, le M23, qui a annoncé la constitution d'un gouvernement et qui a commencé à s'installer avec une administration, voire même à vouloir prélever des taxes à la frontière, en particulier avec l'Ouganda.

D'autant plus que cette rébellion a fait renaître toute une série de groupes armés", a dit M. Reynders, citant notamment la rébellion hutue rwandaise des Forces démocratiques de Libération du Rwanda (FDLR) et les milices locales Maï-Maï.

Le chef de la diplomatie belge a une nouvelle fois appelé le Rwanda à participer à une "solution régionale" à la crise dans les Kivu et au respect de l'intégrité territoriale de la RDC, sous peine de sanctions. Il s'est ainsi dit partisan de l'imposition d'éventuelles sanctions contre Kigali "si rien ne change sur le terrain", mais seulement "de manière coordonnée" au sein des Nations Unies et de l'Union européenne. "S'il y a des sanctions, nous les appliquerons", a-t-il assuré.

Mais les premiers qu'il faut sanctionner, ce sont les dirigeants du M23, a poursuivi M. Reynders, démentant toute visite en Belgique d'une délégation politique du mouvement rebelle. Selon le site Afrikarabia, le M23 a envoyé à Bruxelles, à Paris et en Allemagne un représentant de sa "branche politique", le professeur Stanislas Baleke, pour expliquer leurs revendications.

Les pays de la région, réunis au sein de la Conférence internationale sur la région des Grands lacs (CIRGL), ont bien trouvé un accord de principe sur le déploiement d'une "force internationale neutre" pour éradiquer les différents groupes armés présents dans l'est du Congo. Mais sa mise sur pied effective est très lente, notamment en raison de réticences du Rwanda au renforcement de la Mission de l'ONU en RDC (Monusco).

Selon M. Reynders, Kinshasa et Kigali vont toutefois relancer dès vendredi le mécanisme conjoint de vérification de leur frontière commune, mis en sommeil à la suite des tensions entre les deux pays. "Vendredi, il y aura à Goma (le chef-lieu de la province du Nord-Kivu, frontalière du Rwanda, ndlr) reprise du mécanisme conjoint de vérification" congolo-rwandais, a-t-il dit, en citant Mme Mushikiwabo.

Le Nord-Kivu est en proie depuis fin avril à cette nouvelle rébellion du M23, qui affronte depuis l'armée gouvernementale et s'est rendue coupable de "crimes de guerre à grande échelle" dans la zone qu'elle contrôle, selon un rapport l'organisation de défense des droits de l'Homme Human Rights Watch (HRW) publié mardi. Kinshasa et l'ONU accusent le Rwanda de soutien à la rébellion, ce que Kigali dément.

"Nouvelle preuve" de l'implication du Rwanda dans la guerre

Le gouvernement congolais a présenté mercredi ce qu'il a qualifié de nouvelle preuve de l'implication du Rwanda dans la déstabilisation de l'est de la République démocratique du Congo (RDC), en citant un député d'opposition réfugié à l'ambassade d'Afrique du sud au Burundi.

Le ministre des Médias et porte-parole du gouvernement, Lambert Mende Omalanga, a évoqué, dans un communiqué reçu à Bruxelles, des révélations faites à la police judiciaire burundaise par le député Roger Lumbala, un ex-rebelle et ancien ministre qui préside le Rassemblement des Congolais démocrates et nationalistes (RCDN, issu d'une ancienne rébellion), confirmant qu'il avait été à Kigali à l'invitation du gouvernement rwandais, par le canal du secrétaire particulier du ministre de la Défense de ce pays.

Selon M. Mende, qui cite un procès verbal dûment signé le 1er septembre 2012 par l'opposant, M. Lumbala explique qu'il lui "avait été proposé la mission de déstabiliser la RDC en synergie avec le (mouvement rebelle) M23, l'ex-colonel Jules Mutebusi, l'ancien gouverneur RCD-Goma du Sud-Kivu Chiribanya Chirimwami et l'ex-capitaine Amuli alias Yakutumba".

Ces personnes sont d'anciens membres de la rébellion du Rassemblement congolais pour la Démocratie (RCD), une rébellion soutenue par le Rwanda lors de la dernière guerre civile en RDC (1998-2003).

M. Lumbala s'est réfugié le 3 septembre à l'ambassade d'Afrique du sud à Bujumbura. Il craignait d'être livré aux autorités de Kinshasa qui l'accusent de haute trahison. Le gouvernement congolais le soupçonne de complicité avec l'agression rwandaise à l'est.