NYANGOMA : « La radiation des 22 députés est illégale »
Politique
@rib News, 15/06/08

DECLARATION DU CNDD AU SUJET DE LA RADIATION DE 22 DEPUTES DE L’ASSEMBLEE NATIONALE

Le parti CNDD porte à la connaissance de l’opinion nationale et internationale, sa position sur la radiation de 22 députés Burundais de l’Assemblée nationale, le 5 juin 2008, par l’arrêt RCCB n° 213 de la Cour constitutionnelle du Burundi :

A. Argumentaire

1. Considérant que le président du parti CNDD-FDD a adressé le 24 mai 2008 une lettre au président de l’Assemblée nationale avec pour objet le « Pourvoi de certains sièges du parti CNDD-FDD à l’Assemblée nationale » ;

2. Considérant que faisant suite à cette demande l’honorable président de l’Assemblée nationale a, le 30 mai 2008, adressé à la Cour constitutionnelle une « Requête en occupation inconstitutionnelle des sièges à l’Assemblée Nationale » ;

3. Considérant qu’à la suite de cette requête la Cour constitutionnelle a par l’arrêt RCCB 213, prononcé la radiation de 22 députés qui ont précédemment quitté le parti CNDD-FDD pour les remplacer par des suppléants ;

4. Attendu que  dans sa requête le requérant invoque  l’occupation inconstitutionnelle des sièges par les députés concernés ;

5. Attendu que pour asseoir sa cause il cite les articles 98 et 169 de la constitution de la République du Burundi ;

6. Attendu que l’article 98  concerne les catégories de candidats et la nature du candidat indépendant et  stipule que :

« Les candidats peuvent être présentés par les partis politiques ou se présenter en qualité d’indépendants.

Est considéré comme indépendant, le candidat qui, au moment de la présentation des candidatures n’est présenté par aucun parti politique. » ;

7. Attendu aussi que l’article 169 énonce le pourcentage requis pour l’octroi définitif de sièges aux candidats inscrits sur les listes électorales des partis ou des indépendants et stipule que : « Les candidats présentés par les partis politiques ou les listes d’indépendants ne peuvent être considérés comme élus et siéger à l’Assemblée Nationale que si, à l’échelle nationale, leur parti ou leur liste a totalisé un nombre de suffrages égal ou supérieur à 2% de l’ensemble des suffrages exprimés. » ;

8. Vu que le requérant articule sa démonstration sur le fait que la liste des indépendants n’a pas eu ce pourcentage et que donc il n’y a pas de députés indépendants. Que « certaines personnes considèrent qu’un parlementaire démissionnaire de son parti politique perd automatiquement le droit de siéger dès lors que ce droit n’est reconnu qu’aux élus pouvant justifier d’une attache soit à une liste d’indépendants soit à une liste d’un parti politique ayant réuni le nombre de suffrages égal ou supérieur à 2% de l’ensemble des suffrages exprimés » ;

9. Attendu que l’avis de ces personnes n’est pas dans la constitution de la République du Burundi et ne saurait ni la remplacer ni la mettre entre parenthèses ;

10. Attendu que les députés concernés ont été régulièrement élus et  que les articles 98 et 169 convoqués ne leur sont nullement opposables ;

11. Attendu que la constitution précise les conditions de cessation du mandat de parlementaire à l’article 156  en ces termes : «Le mandat de député et celui de sénateur prend fin par le décès, la démission, l’incapacité permanente et l’absence injustifiée à plus d’un quart des séances d’une session ou lorsque le député ou le sénateur tombe dans l’un des cas de déchéance prévus par une loi organique. » ;

12. Attendu   qu’aucune de ces conditions de perte de mandat ne leur est opposable et n’a été citée par le requérant ;

13. Attendu que la constitution de la République du Burundi n’interdit ni aux partis politiques d’exclure un membre élu député ni aux membres élus députés qui le jugent nécessaire, de quitter leur parti ;

14. Attendu que par le passé d’autres députés ont quitté leur parti sans perdre leur qualité d’élus du peuple et continuent de siéger ;

15. Attendu que la constitution de la République du Burundi précise le caractère national du mandat de député en ces termes :

« Le mandat des députés et des sénateurs a un caractère national. Tout mandat impératif est nul.

Le vote des députés et des sénateurs est personnel » et que dès lors ni le parti d’origine ni son groupe parlementaire ne sauraient en revendiquer la propriété exclusive ;

16. Attendu qu’on ne peut légitimement substituer les clauses constitutionnelles relatives aux candidats  et aux conditions d’éligibilité aux clauses relatives à la cessation de mandat de députés régulièrement élus, et cela d’autant plus qu’il n’y a pas vide juridique en cette dernière matière :

B. Conclusion

En conséquence :

  1. Le président du parti CND-FDD ne pouvait pas et n’a pas pu fonder sa requête.
  2. Les députés radiés ayant été légalement élus et n’étant frappés par aucune clause légale d’exclusion sont dans leur droit et conservent légalement leur titre de députés.
  3. La radiation des 22 députés est illégale et constitue une usurpation de sièges.
  4. Le Président de l’Assemblée nationale a commis une faute grave et est invité à tout faire pour la réparer.
  5. La cour constitutionnelle a manqué de vigilance et s’est prêtée aux manœuvres du parti CNDD-FDD pour récupérer la majorité qu’il a perdue à l’Assemblée nationale. 
  6. Le CNDD exprime sa profonde sympathie pour les honorables députés injustement radiés. Il les invite à ne pas baisser les bras et à lutter pour que justice leur soit rendue.  Ici comme par le passé, le CNDD se tiendra aux côtés de tous ceux qui luttent pour la cause du droit et de la démocratie.
  7. Le CNDD invite tous les parlementaires du Burundi et du monde, tous les partis, toutes les organisations et personnalités épris du droit à se mobiliser afin d’exiger la réhabilitation de ces députés victimes de l’arbitraire.
  8. Le CNDD prend à témoin la communauté nationale et internationale sur l’entêtement du parti au  pouvoir à instrumentaliser politiquement la Justice burundaise  et l’invite à faire pression sur l’Etat Burundais afin qu’il respecte sa propre constitution.
  9. Le CNDD exprime son doute sur la capacité de la cour constitutionnelle à jouer avec professionnalisme et impartialité son  rôle de gardienne de la constitution  et d’arbitre électoral.

Fait à Bujumbura le 12 juin 2008

Pour le Parti CNDD

Le Président  du Parti

Léonard Nyangoma