HRW demande à Nkurunziza de ne pas signer la loi sur les médias
Droits de l'Homme

PANA, 26 avril 2013

 New York, Etats-Unis - L'organisation internationale de défense des droits de l'Homme, Human Rights Watch (HRW), a écrit au président du Burundi, Pierre Nkurunziza, pour l'exhorter à ne pas signer la Nouvelle loi sur les médias, adoptée le 19 avril 2013 par le Sénat.

Dans une lettre écrite jeudi, dont la PANA a reçu ce vendredi une copie, le directeur exécutif de HRW, Kenneth Roth, invite le président Nkurunziza à renvoyer la loi au Parlement pour qu'elle soit modifiée et à veiller à ce que la version définitive restaure les libertés des médias, conformément aux engagements nationaux et internationaux du Burundi.

Il estime que la loi, dans sa version adoptée par le Sénat, porte atteinte au droit fondamental à la liberté d'expression, garanti par la Constitution burundaise et par les conventions régionales et internationales, dont la Charte africaine sur les droits de l'Homme et des peuples, que le Burundi a ratifiée.

"Entre autres dispositions, cette loi compromettrait la protection des sources, limiterait les sujets pouvant être couverts par les journalistes, imposerait de nouvelles amendes aux médias accusés d'enfreindre la loi et exigerait que les journalistes disposent d’un niveau minimal de formation et d’expérience professionnelle", écrit M. Roth.

Selon lui, son adoption pourrait limiter la liberté d'expression et l'indépendance du journalisme au Burundi.

Plusieurs dispositions de la loi pourraient restreindre de manière significative la capacité des journalistes à couvrir les événements dans ce pays, ce qui remettrait en cause la liberté d'expression durement acquise par les Burundais, entre autres droits.

La version adoptée par le Sénat contient plusieurs articles qui pourraient aussi exposer les journalistes burundais à diverses sanctions pour des délits mal définis.

"Par exemple, elle prévoit que les journalistes doivent s'abstenir de rapporter des informations qui pourraient affecter "l’unité nationale; l’ordre et la sécurité publics; la moralité et les bonnes mœurs; l’honneur et la dignité humaine; la souveraineté nationale; la vie privée des personnes; la présomption d’innocence ".

Elle restreint le travail de reportage sur les questions qui impliquent "la propagande de l’ennemi de la nation burundaise en temps de paix comme en cas de guerre", "des informations portant atteinte au crédit de l’État et à l’économie nationale" et "des informations portant atteinte à la stabilité de la monnaie".

La loi exige également que les journalistes soient titulaires d'un diplôme de niveau baccalauréat, ou d'un diplôme équivalent, ou qu'ils aient au moins deux ans d'expérience professionnelle, ce qui crée indûment une barrière pour les futurs ou jeunes journalistes, y compris ceux qui ne disposent pas d'une qualification formelle.

"Le Comité des droits de l'Homme des Nations unies, qui fournit l'interprétation définitive du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, auquel le Burundi est un État partie, déclare dans son Observation générale n° 34 sur la liberté d'expression que les systèmes généraux d'enregistrement ou d'octroi de licence pour les journalistes par l'État sont incompatibles avec la liberté d'expression", poursuit HRW.

Enfin, l'organisation internationale se dit particulièrement préoccupée par le calendrier de ce projet de loi par rapport aux élections prévues au Burundi en 2015.