Omar Bongo s’est éteint après 42 ans de règne sans partage sur le Gabon
Afrique

@rib News, 08/06/2009 – D’après Reuters

Omar BongoLe président gabonais Omar Bongo, doyen des chefs d'Etats africains en exercice et symbole de la "Françafrique", est mort lundi d'un arrêt cardiaque à l'hôpital Quiron de Barcelone où il était hospitalisé depuis fin mai. Il était âgé de 73 ans.

Sa disparition laisse un vide politique. Les analystes pensent que sa succession donnera vraisemblablement lieu à des luttes de pouvoir au sein des factions du Parti démocratique gabonais (PDG, au pouvoir).

Son fils, Ali, actuel ministre de la Défense, devrait tenir la corde en cas de succession dynastique, dit-on de même source. Ben Bongo, qui contrôle les forces de sécurité, a lancé lundi un appel au calme à la télévision nationale au nom de la famille du président défunt.

"Au nom des familles Ondimba et Ebori, j'appelle au calme, à la sérénité des cœurs et au recueillement afin de préserver l'unité et la paix si chères à notre regretté père", a lancé à la télévision le fils du défunt.

Le chef de l'Etat, qui a assuré la stabilité de son pays depuis 1967, est décédé à 14h30 locales après un arrêt cardiaque dans la capitale catalane, précise un communiqué du Premier ministre, Jean Eyeghe Ndong. Ce dernier a annoncé un deuil national de 30 jours.

Omar Bongo présidait aux destinées du Gabon, surnommé "l'émirat du golfe de Guinée" du fait ses immenses richesses pétrolières, depuis plus de 41 ans. Le pays compte aussi de l'uranium et des forêts.

Selon une radio française, le ministère gabonais de la Défense a ordonné la fermeture de toutes les frontières ainsi que de l'espace aérien et maritime du pays. Le maire de Libreville a interdit les rassemblements publics et ordonné la fermeture des bars et boîtes de nuit. Les rues de la capitale sont patrouillées par l'armée.

Aux termes de la Constitution, la présidente du Sénat Rose-Francine Rogombé, membre du parti PDG, doit assurer l'intérim et des élections doivent être organisées dans les 45 jours. La porte-parole du gouvernement et ministre de la Communication Laure Olga Gondjout a assuré que la Loi fondamentale et les institutions seraient "respectées".

Lundi matin, le Premier ministre avait démenti les rumeurs qui circulaient déjà sur la mort du chef de l'Etat, annoncée dès dimanche soir par le site internet de l'hebdomadaire Le Point, information qui avait provoqué la colère de Libreville, ancienne colonie française demeurée en liens étroits avec Paris.

L'état de santé d'Omar Bongo faisait l'objet de spéculations depuis qu'il avait été hospitalisé à Barcelone pour s'y remettre, selon le gouvernement, du choc provoqué par la mort en mars de son épouse, Edith, fille du président du Congo-Brazzaville, Denis Sassou-Nguesso, décédée à l'âge de 45 ans.

La mort de Bongo, qui n'avait jamais suspendu ses activités officielles auparavant depuis son arrivée au pouvoir en novembre 1967, devrait susciter des convoitises, mais les analystes estiment que le parti PDG au pouvoir est en mesure de gérer la transition dans la stabilité.

Le pays, doté d'importantes ressources pétrolières, est dominé par une petite élite étroitement solidaire et les opposants redoutent qu'Ali Bongo ne profite du vide du pouvoir pour en prendre la tête.

Les spécialistes du Gabon le voient eux aussi succéder à son père mais n'excluent pas qu'il puisse s'agir d'un autre membre de la famille.

Bongo Jr pourrait ainsi rencontrer sur sa route son beau-frère, Paul Toungui, actuel ministre des Affaires étrangères et mari de Pascaline Bongo, fille du défunt et influente directrice du cabinet présidentiel.

D'autres noms de possibles prétendants circulent, comme ceux de Jean Ping, ancien chef de la diplomatie gabonaise et actuel président de la Commission de l'Union africaine, et du vice-président Didjob Divungi di Ndinge.

Les principaux bâtiments publics de Libreville étaient placés sous la protection des forces de sécurité gabonaises mardi, au lendemain de la mort du président Omar Bongo, mais le calme régnait dans la capitale dont beaucoup d'habitants restaient chez eux.

Des soldats surveillaient la primature, le siège de la télévision nationale et d'autres édifices, ainsi que les grands carrefours de la capitale, mais leur présence restait discrète.

Malgré quelques inquiétudes pour la stabilité du pays, les observateurs jugent probable que le parti au pouvoir s'applique à administrer le pays avec fermeté au moins au début de la période de transition. Ils notent que les succès obtenus par Omar Bongo en matière d'apaisement des tensions ethniques réduisent les risques d'instabilité.

La personnalité de Bongo a dominé à tel point le pays durant quatre décennies que l'opposition n'a guère eu les moyens de s'attacher un électorat populaire. Mais les risques de troubles sont plutôt à rechercher, selon les analystes, dans les tensions au sein de l'élite politique au pouvoir.

Arrivé au pouvoir en 1967, Omar Bongo était devenu l'un des hommes les plus riches d'Afrique, acquérant des millions de dollars en liquide, résidences et voiture de grand luxe, alors que la pauvreté restait le lot d'une grande partie du Gabon.

Mais plusieurs dirigeants africains lui ont rendu hommage, notamment pour son action de médiateur.

Le président sud-africain Jacob Zuma a estimé qu'Omar Bongo avait apporté "une énorme contribution au continent africain par son engagement dans le règlement pacifique des conflits". Pour son homologue sénégalais, Abdoulaye Wade, Bongo avait "œuvré toute sa vie au service de son pays et de l'Afrique".

A Paris, le président Nicolas Sarkozy a salué un ami fidèle de la France et une haute figure de l'Afrique qui avait "su gagner l'estime et le respect de l'ensemble de ses pairs, notamment par ses nombreuses initiatives en faveur de la paix sur le continent africain".

De source proche de l'Elysée, on indique qu'il y a de fortes chances pour que le président Sarkozy se rende aux funérailles d'Omar Bongo.

Par ailleurs, on déclare de source proche du gouvernement français que l'on n'éprouve "pas d'inquiétude" particulière quant au déroulement de la transition au Gabon.

La France dispose d'une importante base à Libreville, qui joue un rôle central dans le dispositif militaire de Paris sur le continent.