Coup de froid dans les relations entre entre le Burundi et l'ONU
Diplomatie

Afrique Actualité, 21 avril 2014

Burundi : le rapport de la discorde

Par Hortence Iradukunda à Bujumbura

Le rapport du Bureau des Nations-Unies à Bujumbura sur une probable distribution d’armes jette un froid dans les relations entre le Burundi et l'ONU.

Dans un rapport du représentant du secrétaire général des Nations-Unies au Burundi, Parfait Ananga Onyanga parle « d'une probable distribution d'armes aux jeunes du parti au pouvoir. »

Après la sortie de ce rapport, le gouvernement n'a pas tardé à réagir. Dans un communiqué, le gouvernement burundais tient pour responsable les Nations-Unies sur d'éventuelles conséquences.

« Le gouvernement s'inquiète des conséquences néfastes qui peuvent découler du rapport du représentant des Nations Unies sur la prolifération des armes,» annonce Philippe Nzobonariba, secrétaire et porte-parole du gouvernement.

Il met en garde les partis de l'opposition. Si insécurité il y a, ils en seraient les auteurs. « Le gouvernement attire l'attention particulière du secrétaire général des Nations-Unies et du conseil de sécurité en leur demandant de prendre toutes les mesures nécessaires pour que ces groupes ne prennent prétexte au rapport du représentant du BNUB pour déstabiliser le pays en se faisant passer pour des imbonerakure (NDLR les jeunes militants du parti CNDD FDD), » s'alarme Philippe Nzobonariba.

Il a également mis en cause la société civile, arguant que « s'il y a retour à la violence au Burundi, elle serait dû à l'appui et aux financements incontrôlés que certains partenaires accordent aux activistes politiques de la société civile sous prétexte de promouvoir les libertés publiques et la démocratie sans s'assurer de la destination finale des moyens alloués. »

De son coté, le délégué général du Forum pour le renforcement de la société civile FORSC s'inscrit en faux contre le contenu du communiqué du gouvernement, Vital Nshimirimana se dit étonné par la réaction du gouvernement. « On ne comprend pas l'acharnement du gouvernement ou de certaines autorités à l'endroit de la société civile. Tout ce que le gouvernement devait faire est d'accepter les enquêtes indépendantes par des experts internationaux pour montrer ce qui s'est passé en réalité, » a-t-il suggéré

Au cours des quatre heures et demi que le ministre de l'Intérieur et celui de la Sécurité publique ont passé à répondre aux questions des députés, mercredi dernier, Gabriel Nizigama a exclu toute possibilité de mise en place d'une commission d'enquête. « La charge de l'enquête incombe à l'accusation. Le BNUB est invité à fournir les preuves des informations contenues dans le rapport. »

Et d'ajouter qu'« aucun rapport des Nations-Unies ne peut être plus fiable que les rapports des services de renseignements collectés quotidiennement par la police, l'armée et le service national de renseignements. »

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Les députés du CNDD FDD, parti au pouvoir, partagent le même avis. Ceux de l'UPRONA, opposition, souhaitent que le pouvoir accepte une commission d'enquête sur les allégations de distribution d'armes et d'effets militaires et de police aux imbonerakure.

Ce jeudi 17 avril, le président de l'Alliance des Démocrates pour le Changement ADC Ikibiri a comparu devant le procureur de la République à la mairie de Bujumbura pendant plus de trois heures pour être interrogé à propos d'une correspondance qu'il a récemment transmise au secrétaire général des Nations-Unies faisant état d'une catastrophe humanitaire qui risque de s'abattre sur Bujumbura.

Ce procès a eu lieu alors que Paul Debbie, conseiller chargé de la sécurité au bureau des Nations-Unies au Burundi est déclaré persona non grata sur tout le territoire national. Il est prié de quitter le Burundi. Dans une correspondance adressée au fonctionnaire des Nations-Unies, le ministre des Relations extérieures et de la Coopération internationale, Laurent Kavakure, explique cette décision par sa tentative de déstabilisation de l'Etat du Burundi.

Les Nations-Unies n'ont pas tardé à réagir à cette expulsion. Le porte-parole de Ban Ki Moon invite plutôt le gouvernement burundais à faire des investigations sur les graves allégations de distribution d'armes. S'exprimant jeudi dernier à New York, Stéphane Dujarrec a souligné que les voies diplomatiques seront utilisées dans cette affaire.