Avis mitigé de Spécialiste sur la culture de la Stavia au Burundi
Analyses

@rib News, 15/05/2014

Projet de culture de Stavia au Burundi : réaction et conseils

 Par Ir Ntibikunda Antoine

Il y a une semaine, le Conseil des Ministres du Burundi a tenu sa réunion hebdomadaire et dans laquelle a été abordé entre autres la question relative à l’introduction et à la multiplication de la culture de Stévia au Burundi dans un but de gagner des devises [@rib News, 09/05/2014 - Burundi : Projet de la culture de la stévia comme sources de devises ].

Dans cette séance, le Gouvernement du Burundi s’est convenu de trouver d’abord le marché avant la mise en place de cette culture. Voici ce que pense le Spécialiste en cette matière, Monsieur l’Ingénieur Agronome Ntibikunda Antoine.

En vue d’éclairer les membres du Gouvernement du Burundi, ainsi que les autres acteurs du développement burundais, celui-ci se pose plusieurs questions, notamment :

v  Quelle est cette culture de Stévia et son importance ?

v  Quelle est sa composition et son utilisation ?

v  Quels sont les pays qui en cultivent déjà ?

v  Qui sont les consommateurs de cette culture ?

v  La population burundaise pourra- t-elle en profiter comme consommatrice locale ?

v  Quels sont les effets sur la santé résultant de la consommation de cette plante ?

v  Comment peut –t- on évaluer les chances du Burundi pour concurrencer les pays occidentaux qui en cultivent déjà ?

v  Quelle réglementation applicable en matière de la culture et de la commercialisation de cette plante ?

v  N,y aurait-t-il pas d’autres cultures, à part le café et le thé, que le Burundi puisse introduire et  intensifier pour gagner des devises et sans être confronté à la concurrence occidentale ?

 La plante « Stévia rebaudiana » appelée aussi « Chanvre d’eau » ou simplément « Stévia » est une plante de la famille des Asteraceae contenant des édulcorants intenses naturels. Elle est originaire des régions tropicales d’Amérique du Sud (Paraguay) et pousse à l’état sauvage dans les prairies ou des massifs montagneux sous un climat semi-aride. [Photo : Jeune plante de « Stéviarebaudiana »]

Le stévia est cultivé pour servir d’édulcorant dès l’époque précolombiène par les Guarani (peuple indien). Il est aujourd’hui cultivé et utilisé à grande échelle dans de nombreux pays d’Amérique du Sud et d’Extreme Orient. Il représente une part importante des édulcorants consommés au Japon et en Australie.

Des extraits de la plante n’ont été autorisés qu’en août 2008 en Suisse et en décembre 2008 aux Etats-Unis.

Quant à sa réglementation, l’utilisation de la plante n’est pas autorisée dans l’Union Européenne en application de la réglementation relative aux nouveaux aliments. Depuis le  26 août 2009, l’emploi d’un extrait de stévia en tant qu’édulcorant (les édulcorants relèvent de la réglementation relative aux additifs alimentaires) est autorisé provisoirement en France par un arrêté pour une durée maximum de 2 ans. Seuls les extraits raffinés contenant plus de 97 % de rébaudiosides A sont autorisés. Son emploi dans les édulcorants de table est autorisé au titre du règlement (CE) n° 1333/2008 sur les additifs alimentaires.

L’Autorité Européenne de Sécurité des Aliments émet à son tour le 14 avril 2010 un avis favorable à l’utilisation des différents extraits purifiés de stévia, les glucosides de stéviols (stévioside, dulcoside A, rubusoside, stéviolbiosides, rébaudioside A,B,C,D,E et F) en tant qu’additif alimentaire, reprenant la position de la France où l’utilisation du rébaudioside (édulcorant purifié à 97 %) est autorisé provisoirement en poudre fine (généralement de couleur blanche (Source : www.fr.wikipedia.org/wiki/stevia_rebaudiana).

Les édulcorants intenses laissent une sensation sucrée qui dure plus longtemps que celle du saccharose. Leur fort pouvoir sucrant (jusqu’à 300 fois celui du saccharose) suscite son intérêt comme alternative au sucre et à l’aspertame.

Les édulcorants intenses de stévia, sont surtout utilisés pour le thé et le café, où ils remplacent le sucre. Ils n’ont pas les mêmes propriétés que le sucre ou les autres édulcorants et ne peuvent pas le remplacer dans laplupart des recettes de gâteau.

Les Indiens guarani ont utilisé pendant des siècles l’espèce stévia rebaudiana comme édulcorant et comme plante médicinale.

 Les feuilles de stévia contiènent (en % de matière sèche) 6,2 % de protéines, 5,6 % de lipides, 52,8 % de glucides, 15 % de stéoviosides et environ 26.6 % de substance soluble dans l’eau. Les extraits de stévia étant intensement sucrés peuvent remplacer le sucre, sans apporter de calories dans les « produits sans sucre » ou comme édulcorant de table. La feuille de stévia est utilisée dans les infusions et pour remplacer le sucre. [Photo : Poudre de feuille de cette espèce.]

Les extraits de stévia sont autorisés dans la plupart des pays asiatiques (Chine, Japon Corée) et d’Amérique Latine (Brésil, Paraguay, …).

En Suisse, le stévia est uniquement autorisé comme ingrédient dans des tisanes, et ce en quantités minimes. La dose maximale de feuilles de stévia dans une tisane ne doit pas excéder 2% des plantes entrant dans la composition du produit. Tout autre usage de la plante ou des feuilles est interdit dans les denrées alimentaires.Pour ce qui est de l’extrait de Stévia rébaudiana, son utilisation doit faire objet d’une autorisation de l’Office Fédéral de la Santé Publique au cas par cas.

Quant aux effets sur la santé, le rapport de l’OMS de 2006 n’a trouvé aucun effet cancérogène. Ce rapport a  montré que le « stévioside est un principe actif chez les patients souffrant d’hypertension ou de diabète de type 2 », mais que d’autres études étaient nécessaires pour déterminer le dosage approprié (source : Wikipédia).

En 2008, la FAO via le Comité d’Experts du JECFA, a établi une dose journalière admissible maximum pour le stéviol de 4 mg/kg de poids corporel. Des millions de Japonais utilisent des extraits de stévia depuis 30 ans sans aucun effet secondaire connu ou rapporté.  En médecine traditionnelle, ses feuilles sont utilisées depuis des siècles en Amérique du Sud et des recherches sont conduites depuis plusieurs années dans le cadre du traitement du diabète de type 2.

Après avoir analysé en profondeur toutes ces informations, et surtout en sachant que les pays occidentaux cultivent déjà le Stévia en utilisant le système de culture hydroponique (hors sol) pour accroître le rendement, le Spécialiste NTIBIKUNDA Antoine conclut que la culture de Stévia au Burundi présenterait plusieurs contraintes que les résultats escomptés vu que même le marché semble incertain.

Il suggère au Gouvernement du Burundi, de prendre une autre stratégie pour chercher les devises provenant de l’exportation des cultures industrielles, en plus du  café et du thé, en introduisant d’autres cultures exportables et qui ne poussent pas en Occident, notamment :

v  Les agrumes (orange, citron, mandarine,…..)

v  La banane, Avocats, Ananas, Maracuja, Prune de Japon, Arachides.

v  Les plantes stimulantes (le cacaoyer, le tabac, le muté).

v  Les plantes à épices (le Vanilier, le Cannelier, la Cardamome, le gingembre, le giroflier, la muscade et le macis).

v  Les plantes textiles (le cotonnier, la raphia, le sisal, le Kenaf, la roselle).

v  Les plantes à caoutchoux ( l’Hévea,, le guayule).

v  Les plantes insecticides ( le pyrètre, le tephrosia, Derris elliptica, le neem).

v  Les plantes médicinales ( le quinquina, le jojoba, le Ricin, le Karité).

v  Les plantes cosmétiques (le Henné).

v  Les plantes à parfum (la Myrrhe, le Patchouli, le Vétiver, l’Ylang-ylang).

v  Les plantes tannifères et tinctoriales (L’Acacia decurrens, le Campêche, le Palétuvier, le Recouyer).

Le Spécialiste souhaite partager cette idée avec celui qui serait intéressé par la diversification des cultures exportables du Burundi.

Fait à Bruxelles, le 15/05/2014.

Antoine NTIBIKUNDA

Ingénieur Agronome, Spécialiste en Diversification des Cultures.