Human Rights Watch, 10 octobre 2023 « Rejoins-nous ou tu mourras » La répression extraterritoriale exercée par le Rwanda Résumé Lorsqu’un journaliste rwandais vivant en exil à Londres s’est assis sur un banc dans un jardin public, en août 2022, ses premiers mots, après des présentations nerveuses, ont été : « Ma femme ne voulait pas que je vienne. Nous devons être prudents. » Après avoir observé les alentours afin de s’assurer que personne n’écoutait, il explique que certains de ses proches au Rwanda, actuellement sous surveillance, ont été marginalisés du fait de son travail. À Londres, il vit dans la peur et l’isolement, et a souffert de crises de panique et de dépression. Il possède un gilet pare-balles, et des caméras de surveillance sont installées autour de son domicile. « J’ai cessé d’assister à tout rassemblement de Rwandais. Je n’invite plus de Rwandais chez moi. Mais maintenant, je fais l’objet d’attaques en ligne », a-t-il déclaré.
Le président rwandais Paul Kagame ainsi que le parti au pouvoir, le Front patriotique rwandais (FPR), ont souvent été salués pour avoir reconstruit un pays presque entièrement détruit après le génocide de 1994. Cependant, comme le montrera ce rapport, le FPR a, depuis son arrivée au pouvoir en 1994, également répondu avec force et souvent de manière violente aux critiques, déployant une série de mesures pour lutter contre les opposants réels ou présumés, notamment des exécutions extrajudiciaires, des disparitions forcées, des actes de torture, des procès politiques et des détentions illégales, ainsi que des menaces et intimidations, du harcèlement et de la surveillance physique. Ces mesures ne visent pas uniquement les détracteurs et opposants vivant dans le pays. Le contrôle, la surveillance et l’intimidation des communautés de la diaspora et de réfugiés rwandais et d’autres personnes à l’étranger peuvent être attribués en partie à la volonté des autorités de réprimer l’opposition au gouvernement, et de maintenir leur contrôle. Du fait de leur refus de retourner au Rwanda et de leur capacité à critiquer les autorités rwandaises depuis l’exil, les réfugiés et les demandeurs d’asile contredisent aussi l’image que les autorités cherchent à renvoyer – celle d’un pays que ses habitants ne fuient pas. Pour ce rapport, Human Rights Watch s’est entretenu avec plus de 150 personnes en Afrique du Sud, en Australie, en Belgique, au Canada, aux États-Unis, en France, au Kenya, au Mozambique, en Ouganda, au Royaume-Uni, en Tanzanie, en Zambie, ainsi que des membres de leur entourage vivant au Rwanda, afin d’enquêter sur les tactiques mises en œuvre par le gouvernement rwandais et ses intermédiaires pour cibler des Rwandais à l’étranger. Lire l’intégralité du Rapport |