@rib News, 13/11/2008 – D’après Associated Press et AFP Le Rwanda s'apprête à émettre des mandats d'arrêt contre des responsables français mis en cause par Kigali dans le génocide de 1994, sur fond d'escalade judiciaire entre les deux pays après l'arrestation d'une proche du président rwandais Paul Kagame. Le Rwanda va envisager de poursuivre des citoyens français pour leur implication dans le génocide de 1994 si la France inculpe une responsable du gouvernement rwandais, a affirmé mercredi à Genève le président Kagame.
Rose Kabuye, chef du protocole de M. Kagame, a été arrêtée dimanche matin en Allemagne. Elle est soupçonnée d'avoir hébergé des militants tutsis accusés d'avoir tiré en avril 1994 sur l'avion qui transportait l'ex- président rwandais Juvenal Habyarimana. Cet attentat est considéré comme le point de départ du génocide au Rwanda. Mme Kabuye a été arrêtée à l'aéroport de Francfort en vertu d'un mandat européen délivré par la justice française, mais le président Kagame a assuré qu'elle bénéficiait de l'immunité diplomatique. L'avocat de Rose Kabuye a démenti toute implication de sa cliente dans le crash de l'avion en 1994. "Vous inculpez les nôtres, nous inculpons les vôtres", a déclaré Paul Kagame, qui s'exprimait dans les locaux de l'ONU à Genève. Il a accusé les autorités françaises d'avoir violé la législation internationale en ordonnant l'arrestation de Rose Kabuye. "Les pays occidentaux ne permettraient jamais que leurs responsables soient détenus sur ordre d'un juge africain", a-t-il dit. "Nous vivons dans un monde où certaines personnes sont plus égales que d'autres. Je pense que c'est vrai quand cela concerne l'Afrique et le monde développé". "Si cette affaire continue (...) il y aura des juges de villages au Rwanda ou dans n'importe quel autre pays africain qui pourront inculper les mêmes personnes en Europe, en France ou dans d'autres pays", a-t-il lancé. Une source au parquet général du Rwanda a indiqué que la justice rwandaise mettait la dernière main aux actes d'accusation contre 23 des 33 responsables civils ou militaires français mis en cause dans le rapport d'une commission d'enquête rwandaise rendu public le 5 août. "Les actes d'accusation sont en train d'être finalisés, les mandats d'arrêt peuvent être lancés à tout moment", a ajouté cette source, sans préciser l'identité des responsables français visés. Dans ce rapport, la commission accuse nommément 33 responsables politiques et militaires français de l'époque d'avoir "participé" au génocide. La France était "au courant des préparatifs" du génocide, a "participé aux principales initiatives" de sa mise en place et "à sa mise en exécution", a accusé la commission. Au rang des 13 dirigeants français incriminés par le rapport, figurent notamment le président français à l'époque des faits, François Mitterrand, le Premier ministre Edouard Balladur, le ministre des Affaires étrangères Alain Juppé, son directeur de cabinet Dominique de Villepin ou encore le secrétaire général de l'Elysée Hubert Védrine. Cette nouvelle annonce du parquet rwandais s'inscrit dans une bataille judiciaire entre le Rwanda et la France entamée en novembre 2006, lorsque le juge français Jean-Louis Bruguière a signé neuf mandats d'arrêt contre des responsables rwandais, proches du président Kagame. Ces neuf personnes sont accusées d'avoir participé en avril 1994 à l'attentat contre l'avion du chef de l'Etat rwandais de l'époque, Juvénal Habyarimana, dont la mort fut l'élément déclencheur du génocide. |