Burundi : Le pouvoir accusé de "planifier le viol" des opposantes
Opinion

La Libre Belgique, 28 avril 2017

Le viol, l'arme du président contre les femmes burundaises (OPINION)

Une opinion de Juliette Nijimbere (photo), membre du Collectif des femmes pour la paix et la démocratie du Burundi 

Le président Nkurunziza, sa police et sa milice planifient le viol de jeunes filles et de femmes qui s’opposent à lui

Le 26 avril 2015, faisant fi de la Constitution et des Accords de paix d’Arusha, qui limitaient à deux les mandats présidentiels, Pierre Nkurunziza en brigua un troisième. Un de plus. Un de trop.

Comme une bonne partie de la population, les femmes se levèrent pour dire non à ce déni des textes légaux, qui allait plonger le pays dans le chaos. Par cet acte de bravoure, considéré par le pouvoir comme un état de rébellion, les femmes venaient de se mettre dans la ligne de mire et d’ouvrir la voie aux violences et aux vexations à leur encontre.

La mort ne suffit pas

Dans le régime de terreur et de violence érigé en mode de gouvernance, des femmes sont régulièrement tuées ou portées disparues. Certaines, après avoir été arrêtées au grand jour par les services de sécurité, se retrouvent mutilées, jetées attachées dans des rivières ou sur des terrains vagues.

Mais aux yeux du parti au pouvoir, de son sanguinaire service des renseignements et de sa milice Imbonerakure, la mort seule ne suffit pas à mater ce qu’ils considèrent comme l’insubordination des femmes. Car enfin, les femmes, habituées au silence, guère motivées par l’obtention de postes à responsabilités, pourquoi ne se taisent-elles plus ? Pourquoi se mobilisent-elles pour la paix, la sécurité et la justice ? Et pourquoi vouloir attirer l’attention de la communauté internationale sur ce qui se passe dans ce petit oublié ?

Pour cela, et pour d’autres crimes aussi graves que de pleurer les morts, d’exprimer la compassion aux torturés, aux prisonniers et aux réfugiés; mais plus encore de décrier les exactions en cours, une campagne d’incitation aux viols fut planifiée et mise en œuvre. Des jeunes filles et des femmes sont quotidiennement violées par des agents de l’Etat dans des services de police, les prisons ou par les miliciens imbonerakure sur les collines, dans les villes…

Ces derniers l’ont même revendiqué à tue-tête dans les marches-manifestations, où ils se donnent mutuellement le mot d’ordre de violer les filles et femmes de l’opposition pour enfanter des imbonerakure. L’usage du viol se répand aussi dans le milieu scolaire. Mais devant ces incitations à la haine, au viol et autres tortures, la justice reste de marbre.

Que faire ?

Les femmes burundaises demandent du soutien. Tout simplement.

Vulnérables face à leurs tortionnaires, les femmes font ce qu’elles peuvent, elles donnent le maximum mais ont besoin que des voix qui portent loin puissent relayer leur message. Que le monde sache ce que les femmes subissent dans l’ombre. Et qu’il agisse. Que la violence qui leur est infligée ne soit plus banalisée. Que les crimes dont elles sont victimes soient dénoncés au grand jour et punis, conformément à la loi.

Les femmes burundaises demandent la protection, et celle de tout leur peuple. Que les violences s’arrêtent et qu’un dialogue inclusif ramène les protagonistes autour d’une table de négociation pour mettre fin à ces violences.

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