Le Burundi instaure un contrôle très strict de ses fameux tambours
Société

@rib News, 02/11/2017 – Source AFP

Le président burundais Pierre Nkurunziza a récemment instauré un contrôle strict des fameux tambours du Burundi, qui sont désormais "interdits" aux femmes et dont l'usage sera rigoureusement encadré par les autorités, selon un décret présidentiel dont l'AFP a pris connaissance jeudi.

"Il est strictement interdit aux personnes de sexe féminin de battre le tambour; elles peuvent néanmoins exécuter les danses folkloriques féminines en accompagnement au jeu du tambour", précise le texte, dès son préambule.

De même, tous les groupes qui ont pour objectif de faire de l'"animation culturelle" doivent désormais se faire enregistrer au ministère de la Culture et ne pourront se produire en dehors des "cérémonies officielles qu'avec une autorisation du ministre".

Cette demande d'autorisation doit être déposée deux semaines avant l'événement et le ministre se réserve le droit d'accepter ou non, "au regard de l'importance historique de l'instrument".

Inscrit au patrimoine immatériel de l'humanité de l'Unesco en 2014, le tambour - Ingoma en kirundi, la langue nationale - était le symbole dans le Burundi monarchique d'une royauté sacrée et multiséculaire, qui a pris fin avec l'avènement de la République en 1966. Lorsqu'un roi accédait au pouvoir, on disait qu'il montait sur l'Ingoma.

Apanage des hommes de certains clans hutu du Burundi, le tambour n'était battu qu'en présence du roi et pour rythmer des moments importants de la vie nationale: la fête annuelle des semailles, les déplacements du roi, son intronisation...

Cet instrument s'est démocratisé et les groupes de tambourinaires ont fleuri à travers tout le pays depuis une vingtaine d'années. De nombreuses communes, quartiers ou écoles ont leur groupe qui agrémente aussi bien les fêtes officielles que les mariages, remises de diplômes et fêtes de baptêmes. Et quelques groupes de femmes tambourinaires ont commencé timidement à faire leur apparition.

Le décret présidentiel signé le 20 octobre prévoit que si l'organisateur obtient l'autorisation de se produire, il devra payer "au Trésor public une redevance de 500.000 Fbu (245 euros) par exhibition". Cette redevance devient journalière si le groupe va se produire à l'étranger.

Sur Twitter, de nombreux burundais ont dénoncé ces derniers jours "une dérive monarchique" du pouvoir burundais et "un signe de plus de la volonté de contrôler la société burundaise".

"Avec ce texte, le tambour n'appartient plus au citoyen burundais, il appartient au gouvernement", a réagi Pacifique Nininahazwe, un des leaders de la société civile en exil.

Fin octobre, le gouvernement a adopté un projet de révision de la Constitution qui, s'il était adopté par référendum, permettrait au président Nkurunziza de briguer deux septennats consécutifs à partir de 2020.

Le pays est plongé dans une crise politique profonde depuis l'annonce de la candidature controversée de M. Nkurunziza à un troisième mandat en avril 2015, obtenu en juillet de la même année. La crise a fait entre 500 et 2.000 morts selon les sources (ONU ou ONG).


Burundi : vers un contrôle strict des tambours du pays

RFI, 02-11-2017

Au Burundi, le président a signé il y a quelques jours un décret qui vise à un contrôle strict de l'usage des fameux tambours du pays. L'objectif est de redorer l'image des tambours sacrés du Burundi, qui ont été inscrits au patrimoine immatériel de l'humanité de l'Unesco en avril 2014 et qui s'étaient banalisés au cours des dernières décennies. Héritiers d'une tradition séculaire et symbole de la royauté au Burundi, les tambours ont été pendant des siècles l'apanage de quelques tribus hutus et ne pouvaient être battus qu'à de rares occasions et en présence du Mwami, le titre porté par les rois de ce pays. Mais avec l'instauration d'une République et les changements de mentalité, le tambour s'est peu à peu démocratisé. Et le gouvernement a décidé d'y remettre de l'ordre par décret « portant réglementation du tambour ».

Les groupes de tambourinaires avaient fleuri à travers tout le Burundi depuis quelques décennies. De nombreuses communes, quartiers ou écoles, avaient désormais des groupes attitrés pour agrémenter aussi bien les festivités officielles que les mariages, diplômes et autres fêtes de baptêmes.

Et suprême affront pour les puristes, quelques groupes de femmes tambourinaires avaient commencé à faire leur apparition timidement.

Tout cela est fini. Le nouveau décret présidentiel interdit strictement, et dès ses premières lignes, « aux personnes de sexe féminin » d'en jouer. Elles pourront tout juste danser sur sa musique.

Autre règle qui fait des mécontents, le décret de Pierre Nkurunziza veut désormais que les tambours ne soient plus battus que lors de cérémonies officielles, et par des groupes reconnus et enregistrés au ministère burundais de la Culture.

Pour les fêtes à caractère social, il faudra non seulement une autorisation spéciale, mais l'organisateur de l'événement ou le groupe de tambourinaires paiera en plus une redevance de 245 euros, de quoi décourager les centaines de groupes qui en vivaient.

Et si un groupe de tambourinaires va se produire à l'étranger, cette somme sera multipliée par pratiquement autant de jours qu'il va y passer.

Mais plus surprenant encore, c'est que ce texte n’ambitionne rien de moins que d'être appliqué dans le monde entier, selon son 2e article.

Et pour cela, les dizaines de groupes de tambourinaires de la diaspora burundaise sont sommés de se faire inscrire auprès des ambassades de leur ressort, et ils devront désormais débourser 245 euros pour chaque tambour présent sur scène s'ils organisent un spectacle.

Sinon, le décret du président burundais leur promet une forte amende.