Burundi : Le sommet de l’EAC a demandé à Mkapa de poursuive sa mission
Diplomatie

PANA, 25 février 2018

Burundi : Confiance renouvelée malgré un bilan mitigé au Facilitateur est-africain dans la crise burundaise

Bujumbura, Burundi - Le Communiqué final du 19ème Sommet des chefs d’Etat de la communauté d’Afrique de l’Est/East african community (CAE/EAC) tenu vendredi à Kampala, la capitale d’Ouganda, a renouvelé la confiance "totale" à Benjamin William Mkapa (photo), l’ancien Président tanzanien, reconverti par la sous-région en Facilitateur dans le laborieux dialogue inter-burundais de sortie de la crise politique autour des élections controversées et émaillées de violences de 2015, dont une tentative de putsch militaire manqué.

Le Sommet, auquel le chef de l’Etat burundais, Pierre Nkurunziza, s’est fait représenter par son Vice-président, Gaston Sindimwo, était axé principalement sur le développement des infrastructures et sur les questions de santé au sein de cette communauté de libre-échange, composée du Burundi, du Rwanda, de l’Ouganda, de la Tanzanie, du Soudan du sud et du Kenya.

Le communiqué final rappelle que le Facilitateur a eu l’occasion de présenter un rapport sur ses efforts visant à obtenir une solution négociée pacifiquement à la crise burundaise.

Le statu quo est maintenu alors que des informations contradictoires et insistantes avaient circulé vendredi sur la possible démission volontaire du Facilitateur face aux obstacles dans la conduite de sa mission, de la part des protagonistes de la crise burundaise.

Le Sommet a mis fin aux spéculations, en renouvelant sa confiance au Facilitateur et en lui garantissant «tout le soutien» de la sous-région qui l’a mandaté, il y a deux ans déjà.

S’agissant du bilan, le dernier rapport des Nations Unies note que le dialogue inter-burundais, mené sous les auspices de la Communauté d’Afrique de l’Est, «n’a pas progressé de façon notable» au cours de ces deux dernières années.

A la quatrième et «dernière» session, note-t-on, tenue à Arusha, en Tanzanie, du 27 novembre au 8 décembre, le Facilitateur n’avait pas réussi à amener les parties à engager un dialogue véritable et direct qui leur aurait permis de parvenir à un accord ou de publier, ne serait-ce qu’une déclaration commune.

A la place, le Facilitateur s’était contenté de dresser une synthèse des points de convergence et des points de divergence entre les représentants du pouvoir et ceux de l’opposition.

Les parties prenantes avaient convergé sur 19 points d’ordre général, dont le respect de la souveraineté nationale, les droits politiques et sociaux de tous les Burundais, l’attachement à l’accord inter-burundais d’août 2000, à Arusha, et à la Constitution «comme fondement d’une paix durable, de la sécurité et de la stabilité».

Les mêmes parties prenantes étaient, en outre, tombées d’accord sur le caractère «politique» de la crise burundaise et la nécessité de lui trouver une solution «politique» ; la nécessité d’instaurer des conditions de sécurité qui permettent le retour et la réintégration des réfugiés et des acteurs politiques en exil, ainsi que la réinstallation des personnes déplacées, avec l’aide des différentes parties prenantes et de la communauté internationale.

Les 11 autres points de divergence portaient, entre autres, sur la «dépolitisation des organes de sécurité, les libertés fondamentales des personnes et des groupes légalement organisés, telles que la liberté d’association, la liberté de réunion, la liberté de parole et la liberté de circulation, la libération des prisonniers politiques, les amendements à la Constitution ou encore le passage de la majorité des deux tiers à la majorité simple au Parlement».

En matière de sécurité, les avis avaient divergé sur le désarmement des civils, la sécurité des acteurs politiques rentrant d’exil, la réforme du secteur de la sécurité, la collaboration avec les groupes armés disposés à renoncer à la violence et à parvenir à un règlement pacifique, l’ouverture de l’espace politique, la levée des mandats d’arrêt et l’amnistie pour les détenus politiques.

C’est sur cette base que le Facilitateur a fait un rapport au Sommet de Kampala, sans que les chefs d’Etat de la sous-région ne tranchent pendant que couve une autre crise autour des réformes constitutionnelles à l’approche de nouvelles échéances électorales au Burundi.

Le gouvernement burundais insiste toujours pour que soit rapatrié le dialogue inter-burundais, et affirme qu’il n’y a plus de crise dans le pays.

Le 11 décembre dernier, le Porte-parole du gouvernement, Philippe Nzobonariba, a publié une déclaration dans laquelle il affirmait que la quatrième session d’Arusha était la dernière à se tenir en dehors du pays.

La déclaration demandait également que les réfugiés et les exilés burundais qui ne faisaient pas l’objet de poursuites rentrent au pays pour participer aux élections générales de 2020.

Les leaders politiques et ceux de la société civile faisant l’objet de mandat d’arrêt internationaux pour leur rôle supposé dans le mouvement insurrectionnel de mai 2015 contre le troisième mandat présidentiel «illégal», quant à eux, devraient rentrer afin de comparaître devant la justice.

Le 8 décembre, le Conseil national pour la défense de l’accord d’Arusha et l’Etat de droit, (CNARED, principale plate-forme de l’opposition intérieure et en exil), de son côté, exhortait, dans un communiqué, les dirigeants régionaux à exercer des pressions «politiques, diplomatiques et économiques», pouvant aller jusqu’à un «embargo», afin de contraindre le Président Nkurunziza à participer, «en personne», au dialogue pour éviter les risques d’une guerre civile.

Cette perspective semble néanmoins s’éloigner au rythme où vont les préparatifs de nouvelles échéances électorales, à l'horizon 2020, de l'avis des analystes à Bujumbura.

Le 17 février dernier a été marqué par la fin du recensement des candidats électeurs au référendum constitutionnel de mai prochain et aux élections générales de 2020 sur des résultats inattendus de plus de 5 millions d’inscrits, soit un taux de participation de 112,02% par rapport aux prévisions de la Commission électorale nationale indépendante (CENI).

Certains dans les milieux de l'opposition ont parlé de "fortes pressions" sur les citoyens pour se faire enrôler, ce dont le pouvoir burundais s'est défendu, y voyant plutôt la maturité politique de la population et la soif de démocratie.