La Communauté est-africaine maintient le statu quo sur la situation au Burundi
Diplomatie

PANA, 03 février 2019

Bujumbura, Burundi - Le communiqué final du 20ème Sommet ordinaire des chefs d’Etat de la Communauté d’Afrique de l’Est (CAE) tenu vendredi à Arusha, en Tanzanie, annonce que les "consultations internes" vont se poursuivre sur la crise politique au Burundi, suite aux élections controversées et émaillées de violences de 2015, qui était un des points très attendus à l’ordre du jour de la rencontre

La décision "à minima", selon les analystes à Bujumbura, a été prise après avoir entendu le rapport de l’ancien président tanzanien, Benjamin William M’Kapa, Médiateur dans la crise burundaise, sous l’égide de la Communauté est-africaine, indique le communiqué.

Le rapport résultait de cinq rounds infructueux qui n’ont jamais dépassé le simple cadre de consultations séparées avec les parties prenantes à la crise burundaise.

Au dernier round d’octobre, le Médiateur avait menacé de démissionner face au manque de volonté des acteurs politiques burundais de venir à bout de leurs querelles par une solution pacifique négociée.

La médiation a toujours buté sur le refus obstiné du pouvoir burundais de s’asseoir autour d’une même table de discussions avec l’opposition, pour son rôle présumé actif dans le mouvement insurrectionnel contre le troisième quinquennat présidentiel et la tentative de putsch manqué qui a suivi, en 2015.

Les analystes à Bujumbura considèrent que le pouvoir burundais sort néanmoins "la tête haute", contrairement à l’opposition dont l’appel à "une action urgente afin d’éviter une guerre civile au Burundi" n’a pas eu d’échos à Arusha.

Dans une lettre des huit ténors de l’opposition en exil au chef de l’Etat ougandais, président en exercice de la Communauté est-africaine, les co-signataires chargeaient le pouvoir burundais d’avoir fermé "définitivement" la porte à une solution négociée à la crise par son absence au 5ème et dernier round des pourparlers organisé l’année dernière, du 24 au 29 octobre.

En revanche, "le même pouvoir projette d’organiser des élections générales en 2020 dans un cadre politico-légal qui exclut une grande majorité des partis et des personnalités politiques de l’opposition", ce qui est, aux yeux des signataires, une "déclaration de guerre qui va replonger le Burundi dans une guerre civile avec un risque d’embraser toute les sous-région".

"Pour éloigner le Burundi de cette dangereuse perspective, la sous-région, conjointement avec l’Union africaine et les Nations unies, devrait prendre des sanctions drastiques, afin de contraindre le pouvoir burundais à abandonner cette voie de la violence et organiser un autre cadre de résolution de cette crise", concluait la correspondance au président en exercice de la CAE.

Le 20ème Sommet ne s’est pas non plus prononcé ouvertement sur le différend supposé entre le Burundi et le Rwanda, deux plus proches voisins de la sous-région, qui s’accusent de déstabilisation réciproque par groupes armés interposés et se tournent le dos depuis bientôt quatre ans.

Le hasard du calendrier a voulu que le chef de l’Etat rwandais, Paul Kagame, prenne les commandes de la présidence tournante de la Communauté d’Afrique de l’Est au terme du mandat de son homologue ougandais, Yoweli Kaguta Museveni.

Paul Kagame, dont le pays est considéré comme un "ennemi" à Bujumbura, est encore pour un temps le président en exercice de l’Union africaine (UA).

L'instance continentale a été déjà saisie d’une plainte par le Burundi contre les "velléités déstabilisatrices" du Rwanda,  sans toutefois pousser l'UA à prendre position pour l’une ou l’autre partie à ce jour.

Les Nations unies disposent aussi d’un "Envoyé spécial pour le Burundi", l’ancien président de la transition au Burkina Faso, Michel Kafando, là aussi sans progrès tangibles, deux ans après sa nomination.

L’Union européenne, quant à elle, est un autre membre de la Communauté internationale qui a usé de sanctions économiques, diplomatiques et financières, sans non plus parvenir à contraindre Bujumbura à dialoguer avec son opposition en vue d’une solution pacifique à la crise interne au Burundi.

L’incertitude persiste également, suite à des menaces de l’opposition armée d'en découdre avec le pouvoir burundais par la force, notent les observateurs à Bujumbura.

Des rapports onusiens alertent sur l’existence de plusieurs mouvements armés, nés de la crise politique, mais dont l’activisme est resté jusque-là au niveau de simples menaces face à un pouvoir burundais qui veille particulièrement au grain en matière de sécurité, échaudé par le mouvement insurrectionnel de 2015.