Burundi : les biens de certains opposants vendus aux enchères
Justice

Deutsche Welle, 10.11.2020

C'est ce mercredi (11.11.2020) que débute à Bujumbura, la vente aux enchères des biens meubles et immeubles de certains opposants au régime.

Le ministère de la Justice, dans un communiqué, relayé à la radio-télévision nationale, a invité toute personne désirant acheter ces biens saisis par l’Etat, à se présenter dans les enceintes de l’ancienne présidence jusqu’au samedi 14 novembre.

Sont concernées par cette procédure de vente aux enchères, une trentaine d’opposants au régime Burundais, dont les biens, meubles et immeubles avaient été saisis en mai 2019, par la justice burundaise. 

Ceux-ci avaient contesté le troisième mandat du président défunt, Pierre Nkurunziza, en 2015. 

On peut citer parmi eux, l’ancien vice-président, Bernard Busokosa, l’ancien porte-parole du CNDD-FDD au pouvoir, Onésime Nduwimana, l’opposant Alexis Sinduhije, ou encore la directrice de la Maison Shalom, Marguerite Barankitse.

"Moi j'ai appris seulement qu'ils ont été à Ruyigi (dans l'est du Burundi), qu'ils ont pris donc des véhicules de la Maison Shalom et puis mes biens personnels. Mais les biens de la Maison Shalom, ce sont des biens qui appartiennent à la population, surtout aux enfants. On confond Marguerite Barankitse avec la Maison Shalom. Non. C'est une personnalité morale, la Maison Shalom", témoigne Marguerite Barankitse qui vit en exil à Kigali au Rwanda.

Des officiers de l’armée, aussi concernés

Les biens d’officiers de l’armée aux arrêts seront également vendus aux enchères. Il s’agit précisément de neuf militaires qui ont été condamnés à perpétuité pour leur participation au coup d’Etat du 13 mai 2015.

Parmi eux, le meneur du coup d'Etat, l’ancien chef d’Etat-major (en 2009), le général Godefroid Niyombare, ou encore le général Cyrille Ndayirukiye, ancien ministre de la Défense, un des principaux meneurs de ce putsch manqué. Maître Bernard Maingain, son avocat, estime que "cette façon de faire a pour objectif d'appauvrir les personnes qui sont en prison et de rendre leurs conditions de détention encore plus difficiles. On peut leur donner la chance d'attendre l'issue des procédures devant les hautes cours des droits de l'Homme, avant de s'attaquer à leurs biens."

Conséquences incalculables

Ces ventes aux enchères auront des conséquences incalculables, selon Vital Nshimirimana, le président du Forum pour le renforcement de la société civile (FORSC), qui vit lui aussi en exil.

"Beaucoup de familles se retrouvent dépouillées de leurs biens. Des enfants qui fréquentent l'école ou qui n'avaient d'autre toit que la maison familiale se retrouvent à la rue, soutient-il.

Pour sa part, le photo-journaliste Burundais,Teddy Mazina, affirme que "le pouvoir est dans une logique ethnique, de punition collective. Ceci vient confirmer les discours des différents camps extrêmes (Hutu et Tutsi). C’est une grave régression que l’accord d’Arusha avait voulu éviter."

La DW n’a pas réussi à joindre la ministre de la Justice Jeanine Nibizi. "Les journalistes nationaux ne seront pas autorisés à couvrir cette vente aux enchères", nous a cependant confié un de ses collaborateurs qui a requis l’anonymat.