Malgré le Covid-19, la région des Grands Lacs réalise d’importants progrès
Diplomatie

Jeune Afrique, 12 janvier 2021

[Tribune] - Par  Huang Xia

Envoyé spécial du Secrétaire général des Nations unies pour les Grands Lacs

 Bien qu’encore affectée par des crises sanitaires, sécuritaires, humanitaires et diplomatiques, la région des Grands Lacs enregistre des évolutions positives, que l’ONU entend accompagner.

L’ONU a célébré, tout au long de l’année 2020, ses 75 ans d’existence. Dans ce cadre, l’entité que je dirige – le Bureau de l’envoyé spécial du secrétaire général pour la région des Grands Lacs – a organisé une série d’activités commémoratives, notamment un dialogue interactif avec près d’une centaine de jeunes issus des pays de la région en décembre dernier. L’objectif de ce dialogue virtuel fut de savoir quelles étaient leur vision de l’avenir et leurs aspirations pour un futur meilleur, et ce que, de leur point de vue, l’ONU pourrait faire à ces fins.

C’est peu dire que de rappeler que la région des Grands Lacs, stricto sensu, revient de loin. Pendant des décennies, elle fut le théâtre de drames humains inqualifiables, conséquences de cycles de conflits meurtriers, ainsi que de déplacements massifs et répétés de populations. Les casques bleus y furent déployés en juillet 1960 – pour la première fois sur le continent – avec l’Opération des Nations unies au Congo (ONUC). C’est également dans cette région que le second secrétaire général de l’ONU, Dag Hammarskjöld, connut un destin tragique en 1961.

Dynamisme économique et politique

Bien qu’encore affectée par des défis multiformes persistants – activités de groupes armés perpétuant l’insécurité chronique dans l’Est de la RDC et participant à l’exploitation illégale des ressources naturelles, crises humanitaires, relations toujours difficiles entre certains pays, pandémie de Covid-19 –, la région a connu ces dernières années des progrès sans précédent, tant sur le plan politique et diplomatique, qu’économique et social.

Sur le front diplomatique, ces dernières années ont vu des évolutions méritoires visant à dissiper les tensions entre pays, comme en témoigne la résolution pacifique du différend frontalier entre la Zambie et la RDC, ainsi que les efforts de rapprochements entre le Burundi et le Rwanda, et entre le Rwanda et l’Ouganda.

Au niveau économique, les pays des Grands Lacs, avec leurs immenses richesses naturelles, continuent d’enregistrer parmi les taux de croissance les plus importants du continent, malgré le ralentissement dû à la pandémie. Déjà, certaines prévisions optimistes estiment que le Kenya, l’Ouganda, le Rwanda et la Tanzanie notamment sont susceptibles de renouer dans la période post-Covid, peut-être dès 2021, avec des taux de croissance dépassant 5 %, contre une moyenne continentale prévue autour de 3 %.

Ce dynamisme économique et ces progrès politiques et diplomatiques sont aussi le résultat d’une participation plus marquée aux affaires publiques des femmes, véritables actrices des transformations observées dans la région. Dans plusieurs pays, et bien qu’à divers degrés, elles occupent des postes de décision importants, notamment en RDC, en Tanzanie, au Burundi, en Ouganda et au Rwanda, ce dernier étant considéré comme un modèle, sur le plan mondial, en matière de parité entre les sexes.

Diplomatie discrète

L’ONU continuera de soutenir la dynamique globale positive observée dans la région, de façon certes réaliste mais déterminée, et dans les limites de ses capacités et de ses mandats. Pour ce faire, nous disposons d’un outil tout indiqué : la Stratégie des Nations unies pour la consolidation de la paix, la prévention et la résolution des conflits dans la région des Grands Lacs, que le secrétaire général a soumise il y a quelques semaines au Conseil de sécurité.

Tirant leçon du passé, résolus à promouvoir l’esprit et la lettre de la Charte des Nations unies et des instruments continentaux et régionaux, nous continuerons aussi à soutenir les efforts des pays de la région en vue d’une stabilité et d’un développement durable. À cet effet, je poursuivrai, à travers une diplomatie discrète et patiente, toute initiative visant à renforcer les mécanismes régionaux, à appuyer les efforts concertés des pays pour régler leurs problèmes, à éradiquer la menace que font planer les groupes armés et à promouvoir les droits humains.

Il s’agira, pour 2021 comme pour les années à venir, de maintenir l’élan positif actuel en soutenant des solutions endogènes aux défis qui se posent encore à la région des Grands Lacs avec l’appui coordonné de la communauté internationale. Voilà notre crédo et c’est ce qui justifie notre optimisme.