Burundi : le bras de fer entre l’Etat et Rainbow Rare Earths se poursuit
Economie

Agence Ecofin13 octobre 2021

Le Burundi est le seul producteur africain de terres rares grâce à la mine Gakara exploitée par Rainbow Rare Earths. Depuis avril cependant, le pays n’exporte plus aucune tonne du minerai en raison d’une suspension décidée par les autorités pour entre autres une meilleure répartition des revenus.

Rainbow Rare Earths lève 6,43 millions de livres sterling (8,77 millions $) grâce à l’émission de 42,9 millions de nouvelles actions ordinaires sur la bourse de Londres. C’est l’annonce faite le 13 octobre par la compagnie minière basée sur l’île de Guernesey qui précise que les fonds serviront entre autres à financer la prolongation jusqu’à décembre 2022, du régime de maintenance et d’entretien à la mine de terres rares Gakara au Burundi.

Un bras de fer qui dure depuis avril

Mise en place il y a quelques mois, cette mesure s’explique par l’interdiction faite à Rainbow d’exporter sa production dès avril, suivi de la suspension des activités minières imposée à toutes les compagnies minières actives au Burundi, en juillet. Le gouvernement accuse Rainbow de faire des déclarations erronées aux autorités, aussi bien sur les teneurs en terres rares du minerai extrait à Gakara que sur les prix de vente réels des produits exportés.

Dans une mise à jour datant du 5 août, la compagnie rejette ces allégations, notant «que cette question a été traitée de manière exhaustive dans un rapport indépendant, daté du 26 juillet 2019 qui a été commandé par la Banque mondiale à la demande du gouvernement et compilé par SRK Consulting».

Le document indique que le prix payé par ThyssenKrupp, principal acheteur de Rainbow, est basé sur une tarification internationalement reconnue, alors que les teneurs d’exportation sont vérifiées par deux laboratoires indépendants basés au Canada (ALS Laboratories) et en Chine (Baotou Research Institute of Rare Earths). Les autorités n’ont en outre pas fourni de chiffres contradictoires pour soutenir leurs accusations, souligne aussi Rainbow.

Il faut souligner que ces diverses suspensions sont un moyen de pression utilisé par le président Evariste Ndayishimiye arrivé au pouvoir en juin 2020, pour obtenir la renégociation des contrats miniers, une tendance par ailleurs en vogue sur le continent.

«Les conventions actuelles sont trop en défaveur du pays. Notre devoir aujourd’hui est de suspendre l’exploitation des mines pour qu’on renégocie les contrats, car nous sommes les propriétaires du sous-sol et à ce titre, on ne peut pas se contenter de seulement 10 %», explique sur RFI, Ibrahim Uwizeye, ministre burundais de l’Eau, de l’Energie et des Minéraux.

«La menace de rupture unilatérale des accords miniers pourrait effectivement aboutir à des accords plus avantageux pour le pays. Cependant, les négociations doivent se faire dans une totale transparence pour pouvoir réduire le risque de pratiques de corruption», prévient néanmoins le Conseil des droits de l’homme de l’ONU dans un rapport de sa Commission d’enquête sur le Burundi publié en septembre.

Des avancées à Phalaborwa en Afrique du Sud

En attendant l’accord des autorités burundaises pour la reprise des exportations à Gakara, Rainbow prend de l’avance sur son autre projet de terres rares, celui de Phalaborwa en Afrique du Sud. Elle va ainsi consacrer un demi-million de dollars à l’évaluation économique préliminaire lancée fin juillet et dont les résultats sont attendus d’ici le deuxième semestre 2022. Trois millions $ serviront en outre à des travaux techniques supplémentaires en prélude à une future étude de faisabilité bancable.

Emiliano Tossou