Nouvelle publication : « Au nom de toutes les vies volées »
Société

@rib News08/12/2023 

 Des témoins racontent ce qu’ils ont vécu en 1972, 1988, 1991, 1993 et les années suivantes au Burundi.

Par Perpétue Nshimirimana, Lausanne, le 08 décembre 2023

Si nous ne parlons pas de ce qui nous est arrivé, personne ne le fera à notre place. Telle a toujours été ma conviction. Le silence apparaît, dès lors, comme un boulevard laissé libre à ceux qui ont commis des crimes, soucieux que leurs forfaits ne soient jamais portés à la connaissance de leurs victimes et du monde entier. Et en conséquence, aucun recours à la justice n’est à envisager pour quiconque.

Cependant le Burundi post-indépendant a été marqué par des massacres répétitifs à caractère ethnique. Parmi eux, deux génocides sont reconnus, celui de 1965 et celui de 1972[1]. Les victimes ont été les personnes ayant en commun le fait d’appartenir à l’ethnie Hutu. Pendant de nombreuses années, il a été strictement interdit de parler de ce qui s’était réellement passé. Il fallait faire comme si rien n’avait eu lieu alors que des centaines de milliers de personnes étaient passées de vie à trépas du simple fait de leur appartenance ethnique. Il a fallu attendre longtemps pour que les langues commencent timidement à se délier et ainsi réaliser l’ampleur des dégâts causés par cette volonté de détruire toute une partie de la population burundaise. En plus de cette parole libérée, la Commission Vérité et Réconciliation (C.V.R.), mise en place en 2014, a permis aussi de faire des avancées spectaculaires sur le chemin de la vérité.

A cet effet, les familles des victimes ont le devoir de parler pour ceux qui se sont tus à jamais, d’honorer leur mémoire et de réclamer que justice leur soit rendue. Elles doivent intégrer le fait qu’en l’absence de cette demande, les victimes rentreraient dans les oubliettes de l’histoire, ouvrant ainsi la voie à une possible répétition des faits.

C’est dans cette optique qu’a été écrit ce livre. Donner la parole à celles et ceux qui ont à partager leur vécu en 1972, en 1988, en 1991, en 1993 et les années suivantes au Burundi et rendre leur dignité à toutes ces victimes innocentes. Ainsi, elles ne seront pas mortes pour rien.

Perpétue Nshimirimana à Lausanne, Suisse

[1] Rapport Whitaker. Commission du Conseil économique et social des Nations Unies sur les droits de l’homme. 2 juillet 1985