FIDH et ITEKA demandent la reconduction de l'Expert Indépendant sur le Burundi
Droits de l'Homme

@rib News, 09/09/2008 – Source Nations Unies (HCDH)

CONSEIL DES DROITS DE L’HOMME

Neuvième session

Point 10 de l’ordre du jour

ASSISTANCE TECHNIQUE ET RENFORCEMENT DES CAPACITES

Exposé écrit par la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH), organisation non gouvernementale dotée du statut consultatif spécial

Le Secrétaire général a reçu lexposé écrit suivant, qui est distribué conformément à la résolution 1996/31 du Conseil économique et social.

[25 août 2008]

Dialogue interactif, Burundi

La Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme (FIDH) et son organisation membre au Burundi, la Ligue burundaise des droits de l'Homme (ITEKA) expriment leurs préoccupations sur la situation des droits de l'Homme au Burundi et demandent en conséquence au Conseil des droits de l'Homme d'adopter une résolution renouvelant le mandat de l'Expert Indépendant sur la situation des droits de l'Homme au Burundi.

La situation des droits humains au Burundi ne s’améliore pas malgré la mise en place d’institutions démocratiquement élues en 2005, et la signature d’un accord global de cessez-le-feu entre le gouvernement et le dernier mouvement rebelle le Parti pour la libération du peuple hutu-Forces nationales de libération (Palipehutu-Fnl) le 7 septembre 2006.

Ainsi, la FIDH et son organisation membre expriment leur inquiétude concernant la recrudescence de l'insécurité liée aux assassinats et vols à mains armés qui s’observent à travers le pays. En 2007, la Ligue Iteka avait enregistré 641 cas d’atteintes au droit à la vie.

En 2008, la tendance est plutôt à la détérioration. En effet, au cours du 1er semestre 2008, la Ligue Iteka avait déjà enregistré 409 cas.

Les cas de torture sont également nombreux : 301 enregistrés au cours du 1er semestre 2008. En 2007, la Ligue avait recueilli 537 cas de torture.

Par ailleurs, les cas de viol déclarés s’élevaient à 455 au cours du 1er semestre 2008. En 2007, ils étaient 2089.

Au niveau politique, l’année 2008 a connu et connaît encore beaucoup de turbulences avec les crises répétitives à l’Assemblée nationale qui se sont soldées par la radiation par la cour constitutionnelle de 22 députés qui n’étaient plus membres du Conseil national pour la défense de la démocratie – Forces de défense de la démocratie (CNDD-FDD), le parti au pouvoir.

La mise en application de l’accord de cessez-le-feu entre le gouvernement et le Palipehutu-Fnl connaît beaucoup d’entraves malgré le retour le 30 mai 2008 à Bujumbura du leader de ce mouvement.

En outre, les autorités ont une fois de plus porté atteinte aux libertés publiques fondamentales que sont la liberté d'expression et d'opinion. C’est ainsi que l’activité syndicale a connu des entraves depuis le début de l’année (cas des syndicats de la SOSUMO, COGERCO, ministère de la justice). Les partis politiques dits d’opposition ont également des difficultés pour tenir leurs réunions statutaires dans les régions.

La société civile, qui semblait épargnée, est depuis le mois de juillet 2008 dans le collimateur du pouvoir. Depuis le 23 juillet 2008, date à laquelle la radio Rema FM, proche du pouvoir a diffusé une interview d’un présumé dissident du Palipehutu-Fnl qui a accusé des membres de la Ligue Iteka de lui avoir confié une mission d’incriminer le responsable du service national de renseignement et le chef d’Etat d’Etat-major adjoint de l’armée dans un plan d’élimination des leaders de l’opposition. Trois membres de la Ligue Iteka et un correspondant d’International Crisis Group ont été appelé à comparaître au parquet de la mairie de Bujumbura. Le président de l’OLUCOME (Observatoire de lutte contre la corruption et les malversations économiques) subit aussi des pressions judiciaires.

La FIDH et la ligue Iteka rappellent le spectre du recul des libertés publiques plane au Burundi notamment avec les attaques et l'inculpation de responsables d'organisations de la société civile et des défenseurs des droits de l'Homme et d'opposants politiques par les autorités burundaises aux fins de réduire au silence toute critique.

Par conséquent, la FIDH et la ligue ITEKA demandent au Conseil des droits de l'Homme d'adopter une résolution ;

- Condamnant les violations des droits de l'Homme perpétrées contre la population civile, les responsables d'organisations de la société civile et des défenseurs des droits de l'Homme et les représentants des partis politiques;

- Appellant les autorités burundaises à :

Mettre pleinement en oeuvre l'accord de paix conclu avec le Palipehutu-Fnl en septembre 2006, notamment la démobilisation, le désarmement et la ré-insertion des combattants afin de garantir aux Burundais la paix, la sécurité et la justice ;

Garantir l'intégrité physique, la liberté d'opinion et d'expression des défenseurs des droits de l'Homme et des membres des organisations de la société civile, des journalistes et des membres des partis politiques ;

Identifier et poursuivre en justice les auteurs des assassinats qui sont commis à travers tout le pays et lutter contre l’impunité des auteurs des crimes les plus graves, particulièrement en allouant les ressources budgétaires propres à garantir l'indépendance de la justice ;

Finaliser les négociations en cours avec les Nations unies pour la mise en place d'un double mécanisme de justice et de réconciliation garantissant le droit des victimes à la vérité, à la justice et à réparation ;

Finaliser la mise en place de la commission indépendante des droits de l’homme conforme aux principes de Paris ;

- Reconduisant le mandat de l'expert indépendant sur la situation des droits de l'Homme au Burundi jusqu’à la mise en place effective de la commission indépendante des droits de l’homme et lui fournissant l'assistance nécessaire au bon accomplissement de son mandat.