Un dictateur ŕ la tęte de l’Union africaine
Afrique

@rib News, 31/01/2011 – D’après AFP

Teodoro Obiang NguemaLa nomination dimanche à la tête de l’Union africaine de Teodoro Obiang Nguema, au pouvoir en Guinée équatoriale depuis son coup d’Etat en 1979, confirme les préjugés sur l’organisation et met à mal les professions de foi démocratiques de l’UA, engagée dans une délicate médiation en Côte d’Ivoire, selon des analystes.

M. Obiang Nguema a succédé au président du  Malawi Bingu wa Mutharika à la tête de la présidence tournante de l’organisation, au premier jour de son sommet.

Teodoro Obiang Nguema, militaire de carrière, a pris le pouvoir par les armes en 1979 en renversant son oncle, le président Francisco Macias Nguema, qu’il a fait fusiller. Il dirige depuis d’une main de fer la Guinée équatoriale, petit pays d’Afrique centrale d’un million d’habitants mais troisième producteur de pétrole d’Afrique subsaharienne.

« Le règne d’Obiang sur la Guinée équatoriale se caractérise par un bilan désastreux en matière de violation des droits de l’homme et de corruption qui, de fait, incarnent l’exact opposé de ce que l’UA cherche à promouvoir sur le continent », estime Aloys Habimana, de l’organisation Human Rights Watch (HRW). L’accession de M. Obiang à la tête de l’UA envoie « tout, sauf un signal positif », ajoute-t-il.

Dans son rapport 2010, l’ONG Transparency International fait figurer la Guinée équatoriale à la 168e place sur 178 pays en matière de corruption. Selon le Sénat américain, le président Obiang et son entourage auraient détourné une partie significative des revenus pétroliers du pays.

La présidence de l’Union africaine est confiée à tour de rôle, pour un an, à l’une des cinq sous-régions du continent et le sommet de l’UA entérine normalement le choix de la sous-région. Après l’Afrique australe en 2010, c’était au tour de l’Afrique centrale de prendre cette présidence tournante.

Le président en exercice n’a qu’un rôle limité sur la destinée du continent et les décisions majeures de l’organisation se prennent, lors des deux sommets annuels, par les chefs d’Etat et de gouvernement.

« Je n’attache pas grande important à la présidence annuelle de l’UA (...) Pour moi, c’est un peu plus qu’un poste honorifique », juge Désiré Assogbavi, officier de liaison du groupement d’ONG Oxfam auprès de l’UA.

Toutefois, d’autres analystes soulignent qu’en dépit du rôle largement symbolique du président de l’UA, ce dernier incarne l’Afrique pendant 12 mois. « L’organisation en est parfaitement consciente, elle qui a écarté en 2007 la candidature du président soudanais Omar El Béchir en raison notamment de la guerre du Darfour ou déjoué en 2010 une tentative du Libyen Mouammar El Kadhafi d’obtenir un second mandat.»

Pour Rueben Lisuka, directeur de Transparency International pour la Zambie, l’UA pâtit d’un manque cruel de dirigeants dûment élus.

« Il y a une pénurie de dirigeants africains crédibles. Nous devons en finir avec le mode d’élection du président en exercice de l’UA et inventer un mécanisme qui permette à l’Afrique de se choisir une figure positive », estime M. Lisuka.

« L’UA dérive doucement vers le modèle de l’ancienne OUA (1963-2002) qui était tellement oublieuse de ce qui se passait autour d’elle et voulait maintenir la tradition de se réunir une fois par an sans s’attaquer aux crises du continent », ajoute-t-il.