Burundi : L’Olucome demande un audit international sur une dette de l’Ouganda
Politique

@rib News, 16/03/2011 - Source PANA

 Une lettre ouverte de l’Observatoire de lutte contre la corruption et les malversations économiques (OLUCOME, une ONG locale indépendante) demande au chef de l’Etat burundais, Pierre Nkurunziza, de prendre l’initiative d’un audit international sur une dette de quelque 15.336.619 dollars américains dont le remboursement par le gouvernement ougandais n’aurait laissé à ce jour aucune trace à la Banque centrale du Burundi.

La dette avait été concédée dans les années 1980 sous forme d’appui militaire par l’ancien chef de l’Etat burundais, le colonel Jean-Baptiste Bagaza, à la Résistance nationale armée (National resistance army, NRA, ex-rébellion) qui était dirigée, à l’époque des faits, par l’actuel président de la République d’Ouganda, Yoweri Museveni.

Le troc risqué consistait à livrer dans le maquis des uniformes de combat, des armes et des munitions, ou encore des boissons et cigarettes, moyennant des espèces sonnantes et trébuchantes une fois que la NRA serait venue à bout du régime de Milton Obote et pris le pouvoir à Kampala.

Après la chute de M. Bagaza en 1986 et son exil en Libye et en Ouganda, au moins six présidents burundais se sont succédés au pouvoir à Bujumbura, mais sans pouvoir arracher la plus petite somme d'argent de la dette au président Museveni.

C’est finalement à partir de 2006 que le régime de Museveni aurait décidé de procéder au paiement échelonné de sa dette envers le Burundi, en livrant du matériel scolaire composé essentiellement de cahiers, stylos à bille, crayons et gommes, dit-on du côté du gouvernement burundais issu des élections démocratiques de 2005.

L’argument n’a cependant pas convaincu l’OLUCOME qui croit plutôt savoir que le matériel scolaire serait un simple don du gouvernement ougandais à la nouvelle politique nationale de l’éducation pour tous les enfants en âge d’être scolarisés.

Dans sa lettre ouverte, l’observatoire exhibe à l’appui des échanges de correspondances ministérielles entre Bujumbura et Kampala qui montrent que l’Ouganda aurait payé rubis sur l'ongle sa dette en espèces, mais que le paiement n’aurait pas laissé de trace à la Banque centrale du Burundi.

Au cas où la dette aurait été liquidée en nature, la correspondance de l’OLUCOME laisse entrendre, là aussi, qu’il subsiste des zones d’ombre.

'Sur la base de documents en notre possession, le nombre total de matériel scolaire fourni est de 12.821.976 cahiers dont la livraison a été faite par paquets de 2.717.256 cahiers, en 2006, 4.187.184, en 2007, 5.917.536, en 2008-2009 pour un montant global de seulement 2.564.000 dollars', peut-on lire dans la correspondance de l’OLUCOME au président burundais.

Le très regardant observatoire de lutte contre la corruption et les malversations économiques estime que, sur une dette globale de 15.336.619 dollars américains, l’Etat burundais doit encore recouvrer auprès de l’Ouganda un montant de quelque 12.772.619 dollars américains, sous une forme ou une autre.


NdlR : Pour rappel, l'un des plus hauts dirigeants du parti présidentiel burundais a dernièrement accusé le président de son parti, le médiateur de la République et deux ministres d'avoir détourné 13 millions de dollars versés par l'Ouganda au Burundi en 2007 pour apurer cette dette.

Manassé Nzobonimpa a affirmé s'être rendu en Ouganda courant 2007 pour y récupérer les 13 millions de dollars, en compagnie du président du parti présidentiel, Jérémie Ngendakumana, d'un autre haut dirigeant de la formation Mohamed Rukara, de la ministre des Finances Clotilde Nizigama et du ministre de l'Education de l'époque Saïdi Kibeya.

« Cet argent a été payé mais n'est jamais arrivé dans les caisses de l'Etat », a annoncé M. Nzobonimpa, qui était, avant son expulsion samedi dernier, numéro 3 du Conseil des sages, l'organe dirigeant du Conseil national pour la défense de la démocratie - Forces de défense de la démocratie (CNDD-FDD), le parti du président Pierre Nkurunziza.