Burundi : des médias bravent l'interdiction de parler du massacre de Gatumba
Société

@rib News, 22/09/2011 – Source AFP 

Cinq radios et une télévision indépendantes du Burundi ont décidé de braver jeudi l'interdiction, décrétée par le gouvernement, de parler de l'attaque qui a fait 39 morts dimanche à Gatumba, localité proche de la capitale Bujumbura.

Ces radios et télévision ont décidé d'organiser, durant toute la journée de jeudi, une synergie des médias en vue d'appeler les Burundais à se mobiliser pour la paix et la sécurité, après le massacre perpétré dimanche à Gatumba, a expliqué Vincent Nkeshimana, vice-président de l'Association burundaise des radiodiffuseurs (ABR).

La Radio nationale (officielle) et la station privée Rema FM, proche du pouvoir, se sont désistées à la dernière minute, selon la même source.

Mercredi, Bujumbura a interdit aux médias burundais de publier, commenter ou analyser des informations liées au massacre et suspendu toutes les émissions en direct à caractère politique durant le mois que vont durer les enquêtes sur la tuerie. Le gouvernement a également interdit à la presse de faire état désormais de dossiers en instruction à la police et au parquet.

Nous n'avons pas voulu défier le pouvoir, mais nous avons décidé de continuer de travailler dans le strict respect de la loi sur la presse, de la Constitution du Burundi, pour la paix et la sécurité dans ce pays, a précisé M. Nkeshimana.

Jeudi, les cinq radios ont organisé des tables rondes, des débats politiques concernant le massacre de Gatumba et la résurgence de la violence dans le pays depuis un an. Elles ont regroupé leurs rédactions et leurs programmes pour l'occasion.

L'interdiction d'évoquer le massacre de Gatumba ne doit durer qu'on mois, c'est une décision du gouvernement qui doit être respectée, a insisté la ministre burundaise de l'Information, Concilie Nibigira. Nous allons analyser ce qui s'est passé et prendre une décision, a-t-elle déclaré.

L'organisation Reporters sans frontières (RSF) s'est quant à elle dite choquée par le black out total imposées par les autorités aux médias sur le massacre de Gatumba et sur toutes les affaires de corruption ou d'exécutions extrajudiciaires dans le pays, appelant le président, Pierre Nkurunziza, à revenir sur cette décision.

Les responsables des médias, la société civile et plusieurs organisations internationales ont accusé à plusieurs reprises le pouvoir burundais de harceler les journalistes indépendants, dont plusieurs ont déjà été emprisonnés.

Dans la nuit de dimanche à lundi, au moins 39 personnes ont été tuées dans l'attaque d'un bar de Gatumba, marquant une nouvelle escalade dans le regain de violence observé dans le pays ces derniers mois.

Les violences ont repris depuis le long processus électoral de l'été 2010, boycotté par l'opposition qui l'avait jugé biaisé, et qui a vu une très large victoire du parti au pouvoir tant à la présidentielle qu'aux législatives et aux élections locales.

Une série d'affrontements entre police et bandes armées et d'exécutions sommaires font craindre une reprise d'hostilités à plus grande échelle au Burundi, où une guerre civile a fait près de 300.000 morts entre 1993 et 2006.