Burundi : Un directeur viré pour avoir refusé une antenne relais dans son lycée
Opinion

@rib News, 23/11/2011

Le directeur du lycée communal de GASANDA licencié pour attitude intègre et citoyenne. Quelle honte pour l’éducation au Burundi !

Le directeur du Lycée communal de Gasanda en commune Bururi Monsieur Edouard NIZIGIYIMANA vient d’être démis de ses fonctions. Il est accusé d’avoir refusé l’implantation d’une antenne LEO (entreprise de télécommunications au Burundi) dans les enceintes du Lycée dont il assurait la direction, selon la lettre de licenciement que le DPE (Directeur Provincial de l’Enseignement) lui a adressée.

Ce licencié en Sciences de l’Education est l’un des rares instruits natifs de la zone Gasanda qui a accepté la direction du collège communal. D’autres notamment l’actuel président du conseil d’administration de l’ARCT (Agence de Régulation et de Contrôle des Télécommunications) avaient refusé l’offre malgré l’insistance de la population locale.

Les faits remontent d’avant mai 2011. Le directeur a vu débarquer des ouvriers de l’entreprise LEO pour entamer les travaux d’implantation de l’antenne. Ni lui, ni ses collaborateurs, ni la population, personne n’était officiellement informé.

Avec l’aide de l’asbl RASODIGA, la diaspora originaire de la zone Gasanda a été informée de ce projet de construction d’une antenne LEO. Plusieurs échanges ont été faits durant tout le mois de mai 2011 pour empêcher l’implantation de l’antenne dans une cour de récréation des élèves. La majorité des intervenants étaient pour une implantation de l’antenne en zone Gasanda, signe de développement, mais ailleurs que dans des cours fréquentées par des groupements de personnes et ce pour les raisons suivantes :        

  • Il y a un risque sanitaire pour la population, en l’occurrence, les élèves et les professeurs, qui seront exposés de manière permanente à un rayonnement intense des ondes issues de la téléphonie cellulaire.
  • Il y a un grand risque de nuisances pour les élèves et les professeurs dans leur travail quotidien.
  • Il y a incompatibilité d’intérêts entre une entreprise à but lucratif et une école dont le but est l’éducation et l’enseignement de la jeunesse.
  • L’école est en pleine expansion et a besoin d’une grande superficie de terrain.

Malgré tous ces débats constructifs, les initiateurs du projet qui ont fini par être débusqués, ne se sont pas avoués vaincus. Ils ont continué leur sale besogne, dans l’ombre, pour construire des stratégies contre le gré de l’école et de la population. Parmi ces initiateurs, il convient de citer la CEPEBU-Eglise de Pentecôte de Kiremba qui fait croire au monde qu’elle est le propriétaire du Lycée communal de Gasanda et qu’elle peut par conséquent vendre une portion de terrain du Lycée, le premier pasteur de l’Eglise Murinda qui exécute aveuglement les ordres venant de Kiremba, le président du CA de l’ARCT qui fait croire au monde qu’il travaille avec les grandes entreprises de télécommunication, alors qu’il met en avant ses intérêts personnels. On pourrait se poser la question de savoir pour qui la CEPEBU et ses acolytes travaillent-ils ?

La stratégie que ces personnes, sans scrupule, et sans foi ni loi, sans vision de long terme, sans projets éducatifs pour les jeunes qui fréquentent le lycée, viennent d’adopter est pour le moins déshonorante pour l’ensemble du Lycée communal de Gasanda, de la population environnante prise en otage par l’entreprise LEO et du système éducatif burundais entier.

Peut-on imaginer une seconde qu’un DPE puisse signer une lettre de licenciement pour les motifs qui ont été développés ci-haut ! Serait-il téléguidé, comme il est de coutume actuellement au Burundi ? N’a-t-il pas un sens de responsabilité et d’analyse pour juger ce qui est utile aujourd’hui ou demain ? Il en va de la moralité de chacun. Le ridicule ne tue pas !

Quand bien même, le Directeur était le seul à s’opposer à cette implantation dans son école, n’avait-il pas le droit de le faire ? Le directeur de l’école, n‘est-il pas le premier défenseur des intérêts de son établissement ?

Par ailleurs, nous voulons témoigner notre soutien à Monsieur Edouard NIZIGIYIMANA. Il est parmi des rares qui a cédé à la tentation de la corruption dans le système actuel burundais et nous lui rendons u grand hommage.

A ses détracteurs, nous leur signifions que ce n’est pas le nouveau directeur qui va autoriser l’implantation d’une antenne sur un terrain scolaire fréquenté par ses élèves et professeurs. Toute la population entière de Gasanda et tout le lycée s’y opposeront jusqu’à ce que justice soit faite.

Nous rappelons que nous sommes pour une implantation de l’antenne dans la zone Gasanda, mais pas à n’importe quel prix, pas sur le dos des élèves et de toute la population qui vont payer les conséquences tant scolaires que sanitaires.

Nous demandons aux initiateurs du projet de se ressaisir pour voir de la même façon le concept de développement. Quel développement à l’horizon si on ne tient pas compte des desideratas de la population et de sa santé ?

Aux autorités locales et administratives, la population de Gasanda interpelle le gouverneur de la province BURURI, le premier pasteur de l’église pentecôte de KIREMBA, pour qu’ils se saisissent de la question qui risque d’envenimer les relations sociales qui sont chère aux habitants de Gasanda.

Le licenciement de ce valeureux directeur du Lycée sous prétexte qu'il est opposé au progrès va entraîner un manque de confiance d’une part, envers le nouveau directeur, du corps enseignant et des élèves, d’autre part. Certains professeurs compétents vont s’en aller. Ils vont laisser derrière eux des élèves qui n’auront plus le droit à la qualité de l'enseignement.

Quelle culture de la médiocrité ! Et quel gâchis intellectuel !

Gérard Bizindavyi