RDC : les résultats des élections de 2011 "ne sont pas crédibles", selon l'UE
Afrique

@rib News, 29/03/2012 – Source AFP

 Les résultats des élections présidentielle et législatives de fin 2011 en République démocratique du Congo (RDC) « ne sont pas crédibles" » en raison de « nombreuses irrégularités et fraudes », estime la Mission d'observation de l'Union européenne dans un rapport publié jeudi à Kinshasa.

La mission « considère que les résultats publiés par la Commission électorale nationale indépendante (Céni) ne sont pas crédibles à la lumière des nombreuses irrégularités et fraudes constatées lors du processus électoral », écrit-elle dans son rapport final sur ces scrutins remportés par le chef de l'Etat sortant Joseph Kabila et l'alliance de partis qui l'ont soutenu.

La Mission d'observation de l'UE (MOE-UE) évoque notamment l'absence d'audit du fichier électoral, le « manque de transparence » lors du nettoyage de ce fichier, le vote sur simple présentation de la carte d'électeur de 3,2 millions d'électeurs, de « multiples incidents de fraude et de bourrages d'urnes » lors du vote le 28 novembre, ou encore une publication des résultats « caractérisée par un profond manque de transparence ».

La MOE-UE recommande principalement la « restructuration » de la Céni en y incluant la société civile pour contribuer à « sa transparence, son indépendance et sa fiabilité ». La Céni est présidée par le pasteur Daniel Ngoy Mulunda, ancien conseiller spirituel du président Kabila

La mission recommande également un audit du fichier électoral et la mise en place de la Cour constitutionnelle. Le rôle de cette dernière est actuellement dévolue à la Cour suprême de justice (CSJ), chargée du contentieux et de proclamer les résultats définitifs des élections. Son indépendance a souvent été mise en cause.

La CSJ avait validé à la virgule près les résultats de la présidentielle à un tour donnés par la Céni : Kabila vainqueur avec 48,95% (8,8 millions de voix) devant l'opposant Etienne Tshisekedi, classé second avec 32,33% (5,8 millions de voix). Ce dernier a rejeté les résultats et s'est autoproclamé président de la RDC.

Les magistrats de la CSJ sont nommés par le chef de l'Etat, « moyennant l'intervention formelle du Conseil supérieur de la magistrature », dont les membres sont aussi désignés par le président, notent les observateurs de l'UE. Dix-huit nouveaux magistrats avaient été nommés à la CSJ lors de la campagne électorale.

Un chapitre du rapport est consacré à l'analyse des résultats de la présidentielle au Katanga (Sud-est), fief de Kabila où il a obtenu près de 90% des suffrages, et le Bandundu (Ouest) où il a bondi de 39,4% en 2006 à 73,4% en 2011, y réalisant « des progressions fulgurantes que l'analyse politique rationnelle a quelque mal à expliquer », selon le rapport.

Dans ces deux provinces l'écart de 3,6 millions de voix creusé par Kabila face à Tshisekedi est « impressionnant et irréversible » et « l'illisibilité politique des résultats (...) vient accroître le doute concernant la crédibilité du scrutin présidentiel », est-il ajouté.

Le rapport recommande aussi une réforme du Conseil supérieur de l'audiovisuel et de la communication (CESAC), qui « n'a pas joué son rôle de régulateur avec impartialité », prenant des mesures « arbitraires et discriminatoires contre les médias d'opposition ».

« Un travail important attend désormais les autorités congolaises et la société civile afin d'améliorer le déroulement des élections pour garantir la transparence et la fiabilité de la démocratie congolaise », a déclaré la députée bulgare Mariya Nedelcheva, chef de la MOE-UE, lors de la présentation du rapport.

La Céni a annoncé une prochaine évaluation du processus électoral actuellement suspendu, avant la publication d'un nouveau calendrier pour les élections provinciales, sénatoriales et locales.