L’exhumation du roi Mwambutsa IV toujours en procès à Genève
Société

@rib News, 17/07/2012 – Source La Libre Belgique

L’exhumation de l'ancien roi du Burundi jugée

Marie-France Cros - La Libre Belgique 11/07/2012

  Le tribunal civil de première instance de Genève a ouvert, mardi matin, le procès de l’exhumation, dans le cimetière de Meyrin (canton de Genève), de la dépouille de l’avant-dernier roi du Burundi, Mwambutsa IV. Celle-ci avait été réclamée par la dernière fille vivante du défunt, la princesse Rosa-Paula, à la demande du gouvernement du président Pierre Nkurunziza qui, en position difficile en raison de la récusation des élections de 2010 par l’opposition, souhaitait que le rapatriement du souverain défunt redonne du lustre à son pouvoir, à la veille du 50e anniversaire de l’indépendance.

Une nièce du Roi, la princesse Esther Kamatari, s’était toutefois opposée à l’opération - qui avait été bloquée provisoirement. Mardi, la justice genevoise a entendu les deux parties afin de décider si, comme le demande Mme Kamatari, l’interdiction de rapatrier les restes royaux qui attendent dans une morgue genevoise - doit être définitive.

Mardi, la princesse Rosa-Paula était représentée au tribunal par sa demi-sœur, Colette Uwimana, fille de la première épouse du défunt. Elle aurait voulu être représentée par la conseillère juridique de l’ambassade du Burundi en Suisse mais cela n’a pas été accepté par le tribunal, la conseillère n’étant pas inscrite au barreau de Genève.

Mme Uwimana a lu devant la cour un texte, interrompue par les larmes, où elle expliquait qu’elle était celle qui avait, durant des années, entretenu la tombe du Roi. C’est elle aussi qui a signé les documents pour l’exhumation, intervenue le 15 mai dernier - et bloquée de manière provisoire le jour même par décision du ministre cantonal chargé de la Police et de la Justice, à la demande de la princesse Esther Kamatari.

Cette dernière a pour sa part produit le testament du défunt, daté du 10 février 1977 - un peu plus de deux mois avant son décès, dû à un cancer - et déposé auprès de Pierre Lacroix, notaire à Genève. Les derniers paragraphes du document, a indiqué Mme Kamatari à "La Libre Belgique", indiquent que Mwambutsa IV donne à Erika Regenfelder, sa dernière compagne, avec qui il vécut une dizaine d’années, "la totalité de mes papiers de famille, archives personnelles, et je ne veux en aucun cas que ma femme ou mes enfants puissent en prendre connaissance. Par ailleurs, j’exprime ici la volonté expresse que ma dépouille mortuaire reste en Suisse et qu’à aucun prix elle soit transportée au Burundi ni en un autre pays quelconque. En effet, ma volonté est d’être enterré au cimetière de Meyrin (canton de Genève), celui de la commune où je fixai mon domicile en Suisse, pays qui m’a accordé tout d’abord l’asile, puis le séjour et enfin un permis d’établissement, ce dont je lui exprime ici toute ma gratitude. Telles sont mes volontés complémentaires ".

Il faut savoir que la tradition dynastique burundaise prévoit un cycle de quatre noms de règne pour ses souverains. Ceux nommés Mwambutsa sont considérés comme des souverains de transition, au règne court, qui meurent à l’étranger. La volonté du défunt était donc conforme au code dynastique burundais.

Mme Kamatari a indiqué avoir appris en dernière minute le projet d’exhumation et écrit le 9 mai aux autorités suisses pour l’empêcher. Selon elle, Mme Erika Regenfelder a, elle aussi, écrit aux autorités cantonales genevoises, le 26 juin, pour s’étonner de ce que l’exhumation a eu lieu sans qu’on l’ait prévenue, alors qu’elle est l’exécuteur testamentaire de Mwambutsa IV.

"Personne, dans la diaspora burundaise en Suisse, n’avait été mis au courant du projet d’exhumation", a dit Mme Kamatari à "La Libre". "Pour moi, on voulait voler le Roi. Ils avaient prévu de le rapatrier le 22 juin et de l’inhumer à nouveau le 26; dans l’intervalle, hommage aurait été rendu à sa dépouille".

Selon l’avocat de Mme Kamatari, Me Ramadoo, l’affaire ne donnera lieu à aucune autre audience. Le jugement sera communiqué par écrit aux parties mais "pas avant quelques mois".