Manassé Nzobonimpa interpellé sur son "virement à 180°"
Opinion

@rib News, 16/01/2013

Monsieur Manassé Nzobonimpa, j’ai des questions à vous poser !

Par Hassan NGENDAKUMANA

Monsieur Manassé, vous avez été parmi les grands fondateurs du parti CNDD-FDD, vous avez bataillé dur, vous avez même occupé les fonctions de secrétaire général et membre du comité des sages de ce parti. Sans doute que vous connaissez les forces et les faiblesses de chacun de vos anciens compagnons de lutte, vous étiez respectés et bien  considérés jusqu’au jour où tout à basculé. Maintenant c’est l’heure de la déception, de la défection. Pourquoi en arriver à l’indiscrétion?

Est-ce parce que vous êtes réellement soucieux de la situation globale du pays ? Ou tout simplement  parce que vous êtes soucieux de votre propre situation ? Vous est-il possible de  critiquer le gouvernement tout en gardant vos secrets ?

Monsieur Manassé, vous avez révélé la façon dite « injuste »  dont Hussein Radjabu a été écarté du CNDD-FDD comme si vous, vous étiez étranger dans cette affaire. Or,  juste après le congrès de Ngozi qui a évincé Hussein Radjabu, un site web pro-CNDD-FDD a publié le 16/ février 2007, un article intitulé : ‘Bravo, Monsieur Manassé NZOBONIMPA, vous êtes un Grand Homme’ dont je vous rappelle les extraits  suivantes : « C’est alors que naquirent deux courants : ceux qui voulaient le congrès dans les meilleurs délais et ceux qui disaient vouloir le voir différé mais qui en réalité n’en voulaient pas. Les premiers s’en remettront au Secrétaire Général du Parti en la personne de Manassé NZOBONIMPA, tandis que les autres n’écouteront que la voix du Président du Parti Mr Hussein  Radjabu ».

« En effet, une certaine opinion avait parlé d’ « ailes » au sein du CNDD-FDD, l’une pro-Radjabu et l’autre pro-Manassé ; cette opinion avait été véhiculée par ceux-là même qui se délectaient déjà d’un éclatement imminent et inéluctable du CNDD-FDD ».

N’est-ce pas vous qui commandiez la destitution de Hussein Radjabu ? N’est-ce pas vous qui avez prononcé un discours d’ouverture, « discours au cours duquel il y eut beaucoup de larmes d’émotion dans la salle des spectacles du Lycée de Burengo » ? N’est-ce pas vous que tous les congressistes avaient félicité pour votre courage et votre détermination d’avoir accompli l’opération d’écarter Hussein Radjabu ?

Pourquoi actuellement vous nous dites que c’est NKURUNZIZA qui a tout organisé ?

Vous vous rappelez de ce qu’a déclaré Madame Alice NZOMUKUNDA juste après sa démission au poste de 2ème vice-présidence ? Elle a dit : « Umukuru w’igihugu ni intungane, uwishe i gihugu ni Hussein Radjabu ».

Monsieur Manassé, vous avez dit dans vos révélations que les élections de 2010 étaient truquées par le CNDD-FDD, et pourtant, vous aviez déclaré haut et fort que le processus électoral de 2010 s’était déroulé conformément aux normes démocratiques standards. Vous êtes même allé loin en précisant que si l’ADC-IKIBIRI a pour racine d’existence le truquage des élections de 2010, alors, il n’a pas raison d’être.

Pourquoi ce virement de 180° ?

Est-ce parce que la politique est l’art de « mentir » ? Est-ce parce qu’un politicien doit s’adapter dans le temps et dans l’espace ? Est-ce par manque de cohérence ou de ligne politique fixe ? Pourquoi ces tâtonnements ?

Monsieur Manassé, en 2006 alors que vous étiez gouverneur de la province de Bubanza, vous parliez souvent à la population de Bubanza les horreurs de la guerre. Vous avez même confessé les actes atroces que vous avez commis pendant la guerre. Plusieurs fois vous avez déclaré et répété devant cette même population que plus jamais la guerre au Burundi quelques soient la situation ou les revendications.

Et pourtant force est constaté qu’actuellement vous semblez ne pas exclure l’usage des armes au cas où. Pourquoi ce changement de cap ?

Est-ce parce que la guerre est plus efficace en termes de rendement ? Est-ce parce que vous avez oublié votre promesse faite à la population de Bubanza ? Est-ce parce que vous êtes tellement dans désespérés que seule la guerre quelques soient ses conséquences est la meilleure solution ? Est-ce parce que vous avez oublié les ravages de la guerre ? Est-il admissible de mettre tout le pays en sang et en pleurs, détruire les écoles et les routes, les champs et le cheptel pour que l’on soit ministre et ou vice président ?

Monsieur Manassé, je sais qu’il y des gens qui souffrent de la mauvaise gouvernance, je sais qu’au Burundi le chemin qui nous sépare de l’Etat de droit est encore long. Mais, pour y remédier :

Faites la politique calmement, tactiquement sans nervosité.

Faites la politique et ayez en esprit que le secret reste le secret quelques soient les circonstances.

Faites la politique mais ne faites pas la guerre.

Faites la politique avec des idées cohérentes sans tâtonnements.

Faites la politique pour le bien du peuple et non pas pour vos « ventres ».

Faites la politique sans promettre un Burundi idéal.

Souvenez vous comment pendant le printemps arabe, les révolutionnaires scandaient des slogans d’idéalisme mais après, c’est la misère qui a remplacé la pauvreté.