Le camp des durs de l’Uprona va-t-il adopter les méthodes du maquis ?
Opinion

@rib News, 14/02/2014

Burundi : Les dessous de l’apparente sortie de crise au sommet de l’Etat

Par Anaclet Muhakwanke

Le Parlement burundais vient d’approuver le candidat proposé par le Président de la République comme nouveau Premier Vice-président. C’est une sortie de crise qui arrange le régime CNDD-FDD mais qui est loin de rassurer la population et la communauté internationale.

Le régime CNDD-FDD a fait son choix : ignorer le camp dur de l’UPRONA et appuyer les esprits apparemment malléables ou en perte de vitesse, vu qu’au sein de l’UPRONA le camp de Concilie NIBIGIRA pèse très léger dans la balance.

En effet, avec la démission du député Bonaventure NIYOYANKANA comme président de l’UPRONA ayant les faveurs du régime, on aurait dû voir le camp du député Charles NDITIJE reprendre les rênes du parti. C’était du moins la conséquence logique de l’allégeance faite par NIYOYANKANA au député NDITIJE. C’était sans compter avec la profondeur du conflit d’intérêts entre les ténors de l’UPRONA.

Pour commencer, il y a l’ancien ministre Jean Baptiste MANWANGARI qui reprend les devants de la scène et se proclame porte-parole de l’UPRONA fort. Or, il est intimement détesté par la jeunesse ambitieuse et machiavélique représentée par Gaston SINDIMWO. Cette dernière compte vendre sa peau très chèrement. Elle a déjà le soutien du parti au pouvoir. Il ne reste qu’à trouver une astuce de casser provisoirement le camp des durs.

Madame Concilie NIBIGIRA a été vice-présidente de l’UPRONA du temps de NIYOYANKANA. C’est en toute légitimité qu’elle peut exploiter le vide laissé par le député NIYOYANKANA. Il lui suffit de sortir de l’ombre et d’adresser une correspondance au ministre de l’Intérieur. Ce qu’elle se hâte de faire. Aussitôt la lettre réceptionnée, le ministre de l’Intérieur répond favorablement et déclare la reconnaître comme président légal de l’UPRONA.

Les choses vont alors s’accélérer. Le Président de la République donne un ultimatum de sept jours à l’UPRONA pour lui proposer des candidats. Les deux camps s’exécutent. Le camp de Concilie NIBIGIRA donne des noms comme Prosper BANZOMBANZA, Francis NGARUKO et Tharcisse NKEZABAHIZI. Le camp de NDITIJE donne les noms de Bernard BUSOKOZA, Yves SAHINGUVU et Bonaventure GASUTWA. Il y a même des concessions importantes proposées par le camp des durs pour faire amende honorable au parti au pouvoir. Hélas, les jeux sont faits : la liste de Concilie s’impose au régime qui veut être cohérent avec lui-même.

Le vote au Parlement n’était qu’une formalité. Le Président de la République a gagné la bataille mais la guerre avec l’UPRONA ne fait que s’amplifier. Le camp de NDITIJE perd et doit adopter les méthodes du maquis car seul le camp de Concilie NIBIGIRA est reconnu pour occuper les bureaux du parti et convoquer les réunions. C’est ainsi que le ministre de l’Intérieur interdit le congrès qui avait été convoqué par NDITIJE.

Ce qui rend plus ou moins plausible l’information non encore vérifiée d’une alliance que le camp des durs serait en train de négocier avec Kigali pour un plan de déstabilisation du Burundi. Pendant ce temps, la communauté internationale maintient l’alerte rouge.

Avec la démission de NIYOYANKANA, le camp des durs avait monté les enchères en réclamant des négociations sous l’égide de la communauté internationale. Il devra se contenter des pressions de certains diplomates occidentaux sur le régime. Il lui importe surtout de faire montre de réalisme politique ou d’innovations pour obtenir de Madame Concilie NIBIGIRA l’organisation d’un congrès.

La solution radicale de mobiliser les membres du comité central et d’obtenir du ministre de l’Intérieur qu’il respecte la volonté des membres de ce comité de se réunir va se heurter à des manœuvres dilatoires du régime. 2015 risque de trouver l’UPRONA en lambeaux et ce sera une énième mort de ce parti phœnix.

Vers un important remaniement du Gouvernement ?

Avec la prestation de serment du nouveau Premier Vice-président, le président NKURUNZIZA a la voie libre pour restructurer en profondeur son Gouvernement. Même dans le camp du CNDD-FDD, les militants réclament un tel acte. Les rumeurs de remaniement avaient circulé dès le début de l’année mais l’enfant terrible de Mwumba avait préféré imposer sa stratégie de l’escargot.

L’opinion nationale s’attend à ce que beaucoup de ministères changent de titulaires et que les militants soient mobilisés pour une victoire sans appel en 2015. Certains ministères pourraient également disparaître comme celui de la Sécurité publique et celui du celui du Développement communal au profit d’un super ministère  de l’Intérieur, ou celui de l’Enseignement secondaire au profit d’un grand ministère de l’Education.

C’est du wait and see et NKURUNZIZA aime toujours surprendre : reprendre les mêmes et recommencer avec les mêmes bévues et déceptions pour l’opinion tant nationale qu’internationale.

Muhakwanke Anaclet