Echec de la révision de la Constitution : Le Cndd-Fdd pris à son propre piège
Opinion

@rib News, 22/03/2014

Le Burundi plus que jamais à la recherche d'un leadership éclairé

Par Anaclet Muhakwanke

Ce vendredi 21 mars 2014, c’est un monde de certitude qui s’est écroulé pour le parti au pouvoir au Burundi. Les conciliabules ont duré bien des mois après l’atelier organisé par l’assemblée nationale au mois de décembre. Le rendez-vous de mars était donné comme le meilleur. Les Burundais viennent pourtant de rater un grand rendez-vous avec l’histoire. A quelque chose malheur est bon.

Est pris qui croyait prendre

Avec l’échec de la révision de la Constitution par le Parlement, l’énième preuve que David défait Goliath est là ! Le mastodonte CNDD-FDD croyait faire d’une bouchée les députés de l’UPRONA (aile favorable à Charles Nditije) mais il a été pris à son propre piège.

Après le refus catégorique du député Jean Minani (du FRODEBU-Nyakuri) de cautionner une révision qui permettrait au président Pierre Nkurunziza de briguer un troisième mandat, le parti au pouvoir a fait les œillades aux députés de l’ethnie Twa. Un poste ministériel a été concédé. Une reconnaissance dont ils rêvaient tant !

Mais il fallait encore une ou deux autres voix pour faire passer les amendements. Le nom de l’inénarrable et versatile Bonaventure Niyoyankana était sur toutes les lèvres. Avec l’appel lancé le jeudi 20 mars 2014 par la représentante légale de l’UPRONA (reconnue par le Gouvernement), le parti au pouvoir croyait avoir l’As gagnant.

A l’Assemblée nationale, une fois la plénière convoquée, que grande ne fut la déception des lobbyistes du CNDD-FDD qui avaient cru en la parole d’honneur de NIYOYANKANA. Ce dernier a brillé par son absence. Comme tous les députés de l’UPRONA et du FRODEBU-Nyakuri, il a opté pour la politique de la chaise vide.

Avec cette volte face, le CNDD-FDD s’est retrouvé pris à son propre piège. Non, ce serait naïf de croire que Niyoyankana a fait faux bond au parti bien nanti en argent qu’est le CNDD-FDD ! Il aurait plutôt pris au sérieux les menaces d’une aile de l’UPRONA qui lui aurait promis une mort atroce s’il osait voter la nouvelle Constitution. D’autres mauvaises langues racontent que le CNDD-FDD lui aurait piqué d’une main gauche ce qu’il lui avait donné de la main droite : une embuscade lui aurait arraché le jackpot avant qu’il ne parvienne à le mettre dans quelque coffre-fort! Ce ne sont que des rumeurs mais la vérité est figée : Niyoyankana a faussé compagnie au CNDD-FDD et il est égal et fidèle à lui-même.  

Une période d’incertitudes commence

Si la Jeunesse Révolutionnaire Rwagasore se félicite de l’échec du vote de la Constitution, du côté du parti au pouvoir, c’est le deuil. Mais une certaine opinion se propage comme quoi les militaires ex-FAB étaient prêts à faire entendre le bruit des bottes et dénoncer violemment le diktat du CNDD-FDD. En réponse à cette menace des militaires ex-FAB, les généraux du CNDD-FDD attendaient de pied ferme cette tentative de putsch. Pour dire que les Burundais se haïssent encore profondément à cause de l’avoir. Mais faut-il se féliciter de ce rendez-vous manqué avec l’histoire ?

Il faut dire que nombreux sont Burundais à spéculer plutôt sur les options qui restent au président de la République. Va-t-il faire jouer les manœuvres dilatoires et retarder le processus de plus d’une année puisque le texte rejeté ne peut plus revenir sur le bureau de l’assemblée nationale qu’après une année ? Va-t-il solliciter la bénédiction du peuple et convoquer un referendum ? Ce que le porte-parole du parti CNDD de Léonard Nyangoma lui renie. Va-t-il laisser l’ancienne Constitution rester en vigueur et enterrer ce faisant la feuille de route et tout le compromis de Kayanza ? Pierre Nkurunziza va-t-il lâcher Concilie Nibigira et tenter de revenir au tandem CNDD-FDD-UPRONA avec Nditije et compagnies? Quel avenir alors pour Prosper Bazombaza et ses ministres? Quellle réponse donner aux militants du CNDD-FDD qui sont d'avis que Nkurunziza devrait savoir partir?

Le salut du Burundi pourrait venir de la quatrième ethnie : la Communauté internationale. Son influence pourrait être déterminante dans cette période délicate du pays. La Communauté Est-africaine pourrait également exhorter Nkurunziza à assumer l'échec de son parti et œuvrer pour un compromis entre forces politiques. Ce serait alors le début des négociations et des concessions qui mettraient au placard les résultats des élections de 2010. Garder la Constitution de 2005 est-il encore possible ? Laissons les juristes burundais et étrangers débattre des chances du président Nkurunziza de sortir de cet imbroglio politique grâce à la panacée du référendum. Dieu protège le Burundi !

Anaclet Muhakwanke