Burundi : Les assises des médias appellent à respecter la pluralité des opinions
Société

RFI, 07-05-2014

Burundi : apaiser les relations entre le pouvoir et les médias

 Les premières assises nationales des médias au Burundi se sont achevées mardi soir à Gitega. Deux jours de discussions visant à renforcer la liberté de la presse et le droit d’informer, mais aussi à insister sur les missions de service public et le sens des responsabilités impartis aux médias. L’enjeu de la viabilité du modèle économique a également été largement abordé.

Le principal objectif des recommandations avancées à l’issue des Assises nationales des médias est avant tout d’apaiser les relations entre le pouvoir et les médias. Et pour la presse, cela passe par une re discussion de la loi sur les médias, tant décriée par la profession, qui les oblige notamment à révéler leurs sources.

Elles visent également à renforcer le droit d’accès à l’information, en appelant le gouvernement, entre autres, à améliorer sa communication. Les médias, notamment privés, s’engagent pour leur part à mieux couvrir les activités des autorités publiques et à respecter - et cela s’adresse aussi aux médias publics - la pluralité des opinions. Après des mois d’extrêmes tensions, les participants considèrent également qu’il faut des rencontres plus régulières entre le gouvernement et les médias.

« Vous avez jeté des passerelles les uns envers les autres », a dit dans son discours de clôture, Vincent Nkeshimana, le président de l’association burundaise des radiodiffuseurs, qui organisaient ces assises. Il ajoute que ces propositions « représentent aussi un nouveau défi pour la profession » : renforcer les liens avec le secteur privé et trouver de nouveaux annonceurs publicitaires. Mais pour cela, il faut des études d’audiences par médias. La presse en appelle aussi aux bailleurs de fonds pour maintenir leurs subventions aux médias qui en dépendent. Or, les aides sont en baisse, déplore la profession. Autre grand sujet de préoccupation : le passage au numérique. Les médias demandent au gouvernement plus de clarté dans le passage des appels d’offres, le maintien de la gratuité de l’accès aux médias.

En quête d'un modèle économique

Pour débattre du modèle économique des médias burundais, un intervenant étranger avait été invité à exposer ses vues, lors de ces Assises. Tom Mshindi, qui travaille pour le groupe de communication kenyan The Nation qui regroupe télévision, radio et presse écrite, est persuadé que les médias burundais doivent opérer une véritable révolution. 

Pour lui, l’approche qu’ont actuellement les médias burundais est « mauvaise ». « Vous ne pouvez pas gérer ce qui est une entreprise commerciale comme si c’était une association. La première chose que les médias doivent apprendre, c’est à se voir comme une entreprise. Vous devez regarder les coûts. Votre positionnement sur le marché. Et vous devez surtout vous pencher sur la manière de communiquer là-dessus », insiste ce spécialiste du marketing des médias. Mais pour certains participants aux Assises, l’approche de Tom Mshindi semblait plus adaptée à la réalité économique kényane qu’au Burundi, notamment dans la recherche d’annonceurs publicitaires.

Ce dernier a aussi expliqué que c’est en investissant dans une imprimerie que The Nation a engrangé des bénéfices, en offrant ce service à d’autres. Antoine Kahurahe, le patron d’Iwacu, vient justement de se doter de ses propres machines. « C’est une excellente idée. Comme nous sommes un hebdomadaire, notre imprimerie ne va pas fonctionner tout le temps. Cela va nous permettre d’imprimer d’autres travaux et, par là, d’avoir des recettes financières. C’est le plus budgétivore, l’impression, et je pense qu’Iwacu aujourd’hui a fait un pas de géant par l’acquisition de ses propres machines. » Ce qui se dégage des ces assises, c’est que même si les médias burundais comptent encore sur leurs partenaires internationaux, ils savent que leur survie dépend tout autant à l’avenir du secteur privé.