PANA, 27 avril 2015 Bujumbura, Burundi - Le mouvement de contestation à un troisième mandat du chef de l’Etat sortant, Pierre Nkurunziza, à la présidentielle du 26 juin 2015, s’est poursuivi, lundi, pour la seconde journée consécutive, dans les rues de Bujumbura où l’atmosphère sentait encore plus que la veille les odeurs irrespirables de gaz lacrymogènes et de pneus enflammés suite aux échauffourées entre des unités anti-émeutes et des jeunes manifestants encouragés par l’opposition et des Organisations de la Société civile, a-t-on constaté sur place dans la capitale burundaise.
La situation de lundi a été encore envenimée par la fermeture brutale de la Maison de la presse du Burundi par la Police en interrompant cinq radios privées indépendantes qui s’étaient mises ensemble pour retransmettre en direct, les événements chauds du jour. Un activiste connu des droits de l’hHmme, Pierre Claver Mbonimpa, en a fait les frais et s'est fait enlever à la Maison de la presse et embarqué à bord d’un véhicule d’immatriculation civile vers une destination inconnue. Le président de l’Association de défense des droits humains et des prisonniers (APRODH) était sur place en qualité d’invité de l’émission en synergie des cinq radios pour commenter l’actualité brûlante du moment dans le pays qu’il suit de près depuis un certain temps. M. Mbonimpa est toujours en liberté surveillée depuis une récente libération, à la condition expresse de ne pas dépasser les frontières de la capitale burundaise et de se présenter devant le juge d’instruction tous les premiers lundis du mois. Le doyen des défenseurs des droits humains avait été inculpé d’atteinte à la sécurité intérieure et extérieure du pays pour des enquêtes en rapport avec une présence supposée de jeunes militants proches du parti au pouvoir en République démocratique du Congo voisine pour des entraînements paramilitaires. L’autre élément de la journée de lundi est qu’une antenne de la Radio publique africaine (RPA, la plus écoutée du pays), dans le Nord du pays, a été également mise sous scellée par la Police sur réquisition du Parquet de la République dans la région. La veille, quatre ministres du gouvernement burundais avaient effectué une descente musclée avec un détachement policier pour ordonner à la station-mère de la RPA, de cesser de relayer en direct le déroulement des manifestations de rues à Bujumbura sous peine de tomber sous le coup de la «complicité à la participation à un mouvement insurrectionnel» et de fermeture. Des pourparlers entre les visiteurs et les responsables de la station ont débouché sur un compromis de cesser le direct que la RPA a toutefois su contourner, lundi, en diffusant des flashs sur l’évolution de la situation du jour à intervalle régulier d’une heure. La seconde journée a été encore marquée par des informations de source médiatique qui restent toutefois à confirmer officiellement, de l’émission de mandats d’arrêt contre deux leaders du mouvement de contestation, Pacifique Nininahazwe et Vital Nshimirimana. L’autre événement du jour a été l’apparition dans des rues de Bujumbura des éléments de l’Armée aux côtés de la Police antiémeute pour modérer les ardeurs des uns et des autres. Le bilan des dégâts humains et matériels de la première journée de contestation a été lourd de deux tués confirmés de diverses sources concordantes, cinq blessés et 200 arrestations dans les rangs de jeunes manifestants. Du côté de la force publique, 15 agents de l’ordre ont été blessés, dont huit grièvement, selon les informations de source policière. Des leaders du mouvement de contestation contre le troisième mandat présidentiel controversé ont continué, lundi, à galvaniser les troupes pour la poursuite des manifestations de rue jusqu’au renoncement de l'intéressé qui est accusé de s’être porté candidat en violation de la Constitution et de l’Accord d’août 2000, à Arusha, sur la paix et la réconciliation nationale. L’Accord d’Arusha a été fondu dans la Constitution de 2005 avec une disposition qui n’autorise pas plus de deux mandats à un chef d’Etat en exercice. La journée de lundi a été encore marquée par une arrivée surprise à Bujumbura de l’envoyé spécial des Nations unies dans la région des Grands Lacs, Saïd Djinnit, pour des entretiens avec différents protagonistes de la crise socio-politique du moment au Burundi qui est également suivie de près par la communauté internationale à cause de son risque de replonger le pays dans les affres de la guerre civile susceptible de déstabiliser également le reste de la sous-région par un afflux massif de réfugiés burundais vers l’extérieur. On estime déjà, du côté du Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), à plus de 17.000 réfugiés burundais qui se sont mis à l’abri des tensions socio-politiques pré-électorales dans les pays voisins, essentiellement au Rwanda depuis le début du mois d’avril 2015. |