La Libre Belgique, 05 mai 2015 Comme on s’y attendait, la Cour constitutionnelle - dont l’opposition a souligné depuis longtemps le manque d’indépendance - a jugé que le Président sortant, Pierre Nkurunziza, avait le droit de se présenter à un troisième mandat. Celui-ci est interdit par l’Accord de paix d’Arusha mais moins clairement par la Constitution qui en est issue (voir "La Libre Belgique" du 25 avril). Comme on ne s’y attendait pas, le vice-président de cette cour, Sylvère Nimpagaritse, a refusé de signer l’arrêt et a fui le pays pour le Rwanda voisin. Il a déclaré que, sur les sept juges, quatre s’opposaient à cette interprétation et que d’"énormes pressions" avaient été exercées sur eux.
Au même moment, la protestation populaire contre le 3e mandat s’étendait hors de la capitale. Une des quatre grandes sorties de la ville, la route d’Ijenda, était ainsi bloquée, mardi, en raison de protestations dans des localités le long de cet axe; à Ijenda, la population a libéré des manifestants incarcérés ces derniers jours pour avoir tenté de protester. On nous signale des manifestations également le long d’un autre des quatre grands axes de sortie de la capitale, la route de Rumonge. On proteste aussi à Rusaka (prov. de Mwaro) et Matana (Bururi). Les Imbonerakure se regroupent Plusieurs de nos informateurs nous signalaient, mardi, le regroupement, dans la capitale, de la milice pro-Nkurunziza, les Imbonerakure, munis de gourdins, "comme s’ils se préparaient à une action d’envergure". Des témoins les ont vus dans la zone "chaude" (surnommée "Gaza") Mutakura-Kinama-Cibitoke, et à Kamenge, fief du général Adolphe Nshimirimana - qui passe pour le chef de cette milice - le bras droit du Président. Si ces regroupements sont le "bâton", la "carotte" peut-elle être constituée par cette proposition faite mardi par le premier vice-Président de la République, Prosper Bazombanza, de libérer les centaines de détenus, supprimer les mandats d’arrêt contre les organisateurs de la contestation et permettre la réouverture des radios, à condition que les manifestations cessent ?Le représentant de la communauté musulmane du Burundi a, quant à lui, appelé les musulmans (4 % de la population) à participer aux protestations; souvent petits commerçants, ils vivent dans tous les centres urbains. Marie-France Cros |